Epilogue

Drago sortit sur le pas de la porte avant de se retourner pour la refermer. Le soleil éclatant de ce mois de septembre lui fit plisser les yeux, aussi sortit-il ses lunettes de soleil qu’il cala sur son nez. Il portait des lentilles à présent, beaucoup plus pratique que ses lunettes qu’il n’utilisait plus que dans la maison. Il transplanna et se retrouva dans une partie d’un hangar abandonné qui servait de zone de transplannage sécurisée. Il marcha d’un bon pas vers son rendez-vous, le dernier pensa-t-il en souriant. Il allait chez son psy, le Dr Carolus, praticien qui lui avait permis de guérir au bout de plus de deux ans de séances bimensuelles.

Le soutien de ses amis, Blaise, Hermione et surtout Harry, l’avait beaucoup aidé à tenir le coup. Il avait plusieurs fois faillit abandonner, se replonger dans ses souvenirs pénibles, se mettre à nu devant un inconnu avait été très difficile pour lui. L’épisode avec Harry l’avait forcé à prendre le Ronflak par les cornes et admettre qu’il avait un problème.

A présent, il se sentait mieux dans sa peau, moins renfermé, il s’était fait des amis chez les anciens Gryffondors surtout, d’ailleurs si Blaise et Ginny sortaient ensemble, c’était grâce à lui, quelque part. Il était heureux que le black ait enfin arrêté de courir les jupons et se soit stabilisé. Celui avec lequel il avait le plus de mal était Ron, en effet, celui-ci était jaloux de la complicité qu’il avait avec sa fiancée, même si maintenant, il savait qu’il ne risquait rien.

Au fil de ses séances, il avait compris que son corps et son cerveau n’était pas en phase. Sa partie « animale » lui envoyait des signaux qu’il ignorait ou rejetait. Le viol dont il avait été victime dans son enfance lui avait fait repousser une partie de lui-même dans les tréfonds de son inconscient, il avait amalgamé homosexualité et pédophilie, aussi n’avait-il pas réalisé que ses préférences se portaient sur les hommes. S’il le savait à présent, il ne l’avait pour autant pas encore complètement accepté. L’acte sexuel lui faisait toujours peur, même s’il se rappelait qu’avec Harry, ça avait été agréable et plus que ça même…

Ce dernier l’avait invité à vivre avec lui au Square Grimmaurd et à sa grande surprise, la cohabitation se passait plutôt bien. Le brun avait une conduite exemplaire, pas une seule fois il n’avait tenté quoi que se soit et cela forçait son admiration. Dans les faits, ils vivaient comme un couple, le sexe en moins. Il avait appris à cuisiner, les repas préparés par Kreattur n’étant franchement pas à leur goût et prenait plaisir à faire à manger pour eux deux. Drago appréciait cette vie, de surcroit, vivre avec Le Survivant lui avait apporté une paix relative de la part de la population sorcière, même si au départ, les commentaires étaient allés bon train, Harry avait su les faire taire.

Il était arrivé. Il emprunta l’escalier pour se rendre au premier étage, sonna à la porte et entra. Il se rendit dans la « salle d’attente » pour ne pas croiser le patient précédent et prit place dans un des deux fauteuils se faisant face de part et d’autre d’une table basse couverte de magazines. La petite pièce était sobrement décorée et de manière assez impersonnelle, seule une azalée en pot donnait un peu de couleur.

Il entendit des pas, puis le bruit de la porte qui s’ouvre et se referme et reposa le National Geographic sur la table. Le praticien apparu dans l’embrasure.

- Bonjour Drago, comment allez-vous ?

- Mais très bien et vous-même ? Répondit-il en se levant avant de prendre la main qu’on lui tendait.

- Ce beau soleil me donne des ailes ! Je pense aller faire une promenade au parc avec mon chien après notre rendez-vous.

- Très bonne idée, répondit le blond en lui emboitant le pas.

Ils s’installèrent dans le bureau du médecin et ce dernier sortit un bloc ainsi qu’un dossier qu’il plaça devant lui. Drago l’observa noter la date au dessous du trait qui séparait les notes entre chaque séance. Il sourit en pensant qu’il faisait les mêmes gestes pour chacun de ses patients, mais que ce serait le dernier pour lui aujourd’hui.

L’homme remonta ses petites lunettes en demi-lune comme celles que portaient feu Dumbledore et souri à son patient en s’installant dans son fauteuil.

- Vous devez être heureux d’être enfin arrivé au terme de nos séances, non ?

- En effet, oui, répondit le blond, ce n’est pas que je ne vous apprécie pas, ajouta-t-il néanmoins, mais je me sens en paix avec moi-même à présent et grâce à vous.

- Oh, ne croyez pas cela mon jeune ami, tout le mérite vous en revient, c’est vous qui avez fait le plus gros du travail, je n’ai fait que vous guider et vous donner des pistes. Tout le monde possède en lui les clés pour guérir, seulement, parfois, pour tout un tas de raisons, c’est trop difficile d’y arriver seul et c’est là que nous intervenons, mes confrères et moi.

- Si vous le dites…

- Effectivement. Cependant, il vous reste un grand pas à franchir et une mise au point sur vos sentiments concernant votre colocataire.

Drago ne réprima pas une grimace et soupira.

- Je sais.

- Et ?

- Et bien, pour ce qui est du… sexe, je ne me sens pas encore prêt et je crois que je ne pourrais sauter le pas qu’avec une personne en qui j’aurais une totale confiance.

- Et M. Potter, lui faites-vous confiance ?

- Oui ! La réponse fusa sans qu’il ait eu besoin d’y réfléchir ce qui fit sourire le praticien et légèrement rougir le blond.

- Mais encore ?

- Vous m’avez eu là ! Plaisanta le patient. Harry est formidable, je le reconnais, je suis bien avec lui, mais je n’arrive pas à déterminer s’il s’agit de reconnaissance, d’amitié ou d’autre chose.

- Je vous comprends et je pense que vous devez faire vos expériences avant de vous engager. Peut-être reviendrez-vous vers lui, mais peut-être pas… Vous ne devez pas vous sentir coupable ni redevable de quoi que ce soit envers lui. Il vous a aidé de son plein gré, poussé aussi par ce sentiment fautif qu’il a envers vous à cause de ses actes.

- Je sais… on vit dans une espèce de routine qui est réconfortante pour moi, il représente une sorte de stabilité, je connais ses sentiments pour moi, je sais qu’il est sincère.

- C’est une situation confortable n’est-ce-pas ? Mais pensez aussi à lui, vous ne pouvez pas le laisser espérer une issue favorable si vous ne le voulez pas. Il vous faut couper le cordon, voler de vos propres ailes et qui sait ce qui en résultera ?

- Vous avez raison, mais c’est un peu effrayant.

- Vous êtes fort Drago, les sentiments, la sensualité, le plaisir, font partis de la vie et de vous, vous devez juste apprendre à lâcher prise et vous êtes bien parti pour réussir. Vous vous masturbez régulièrement à présent, non ?

- Hum… oui, bien sûr, répondit le blond gêné.

- Et vous en éprouvez du plaisir, sinon vous ne le feriez pas… ajouta le médecin avec un clin d’œil.

Le rougissement du jeune homme le renseigna aussi surement qu’un oui.

- A quoi ou à qui pensez-vous pour vous amener au plaisir Drago ?

- Euh, et bien, c’est assez confus en fait, il s’agit surtout de réminiscences des sensations de cette fameuse soirée avec Harry quand nous avons pris cette potion.

- Vous ne fantasmez pas sur des personnes ?

- Ben, non en fait.

- Pourquoi à votre avis ?

Drago fronça les sourcils, oui, tient, pourquoi ?

- Je ne sais pas… peut-être parce que personne ne m’attire en particulier ?

- C’est une possibilité… Creusez un peu le sujet quand vous en aurez le temps. Vous avez encore du « pain sur la planche » comme on dit, mais vous êtes à présent capable de résoudre ces derniers écueils seul, ce que vous avez subi vous à empêché de vivre trop longtemps.

- J’en ai conscience et je vous suis vraiment reconnaissant pour votre aide.

- Je suis là pour ça vous savez, maintenant, j’ai un dernier conseil à vous donner : mordez la vie à pleines dents jeune homme ! Vous le méritez.

- Merci docteur.

Drago sourit. Oui, il allait suivre ce conseil.

- Bien, voici le moment de nous quitter, mais s’il y a quoi que ce soit qui vous pose problème, n’hésitez pas à me téléphoner.

- Je n’y manquerais pas et encore merci pour tout.

Les deux hommes se serrèrent la main et Drago sortit par la porte de derrière. Une fois dans la rue il respira à plein poumons et prit une résolution : avant la fin de l’année, il restait un peu plus de trois mois, il aurait débrouillé ses sentiments pour Harry et décidé de l’avenir à donner à leur relation. Peut-être devrait-il en discuter avec lui ou s’éloigner provisoirement pour y voir plus clair ? Ca n’allait pas être facile, il le savait, autant pour lui que pour le brun, mais il le devait. Et quelque soit l’issue de ses cogitations, Harry resterait son ami.

Drago mit son plan en action et quitta le Square Grimmaurd pour s’installer provisoirement à l’hôtel. Harry lui manqua, mais il se rendit compte que ses sentiments pour lui n’étaient pas romantiques quand il eut un coup de cœur pour Aslan, diplomate indien en poste pour une année au Ministère, malheureusement, l’homme était déjà marié et pas du tout intéressé. Il lui fallut trois ans supplémentaires avant de tomber amoureux de Brian, de cinq ans son ainé, tout nouveau professeur de potions à Poudlard. Ils se tournèrent autour quelques mois avant de sortir ensemble et encore une année de plus pour s’installer tous les deux dans un appartement à Pré-au-Lard. Ils travaillent actuellement sur une potion permettant aux hommes d’avoir des enfants par eux-mêmes.

Harry de son côté savait, sans l’admettre, que le blond ne serai jamais à lui et l’avait laissé partir la mort dans l’âme. Quand ses doutes lui furent confirmés, il se replia sur lui-même pour panser ses plaies. Ses amis se relayèrent chez lui pour le soutenir, même Drago. Il finit par sortir de sa semi-dépression en se consacrant entièrement à son travail. Quatre ans plus tard, il croisa au hasard d’une enquête Dennis Crivey, le jeune frère de Colin, mort durant la bataille de Poudlard. Contrairement à ce que beaucoup croyait à l’époque, c’était lui qui était gay et non pas son ainé ; il fit le forcing pour séduire Harry qui finit par céder. L’amour entra par la petite porte chez le brun, mais se fortifia avec le temps et le jeune blond lui fit oublier Drago. Ils adoptèrent Teddy lupin au décès d’Andromeda et s’installèrent dans une maison à la périphérie de Londres. Ils y vivent heureux en compagnie d’un chien, deux chats, de poissons rouges et d’une chouette.

FIN