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Manchester et Liverpool
Par Cloe Lockless
Harry Potter  -  Romance/Amitié  -  fr
10 chapitres - Complète - Rating : T+ (16ans et plus) Télécharger en PDF Exporter la fiction
    Chapitre 7     Les chapitres     42 Reviews    
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Note : La fin du chapitre précédent était un cauchemar :)

 

 

Manchester & Liverpool

_________

 

7

 

 

 

Liverpool, janvier 1999.

Ici on ne lui avait pas posé de questions. Il n’était pas le plus bizarrement habillé du pub et de toute façon, les quelques buveurs tristes qui s’y trouvaient ne lui avaient pas prêté attention. Il avait commandé quelque chose pour qu’on lui fiche la paix et ne voulait pas réfléchir encore à comment il allait payer. Le pub fermait à sept heures du matin et il avait bien l’intention de prendre la nuit pour y penser.

Il eut un léger sursaut lorsqu’une silhouette s’approcha de sa table.

« Je peux m’asseoir ici ? »

Draco le regarda de la tête aux pieds. Le garçon avait l’air d’avoir son âge. Il avait l’air parfaitement ridicule avec ses bras trop maigres et son verre d’il ne savait trop quoi à la main, mais après tout, ça pourrait lui donner une contenance.

Il se redressa et regarda l’autre tirer la chaise d’un geste fébrile et s’asseoir en face de lui.

« Je m’appelle Timmy. Et toi ?

Draco le dévisagea – il allait falloir faire la conversation. Il mit trop de temps à répondre, et l’autre reprit précipitamment :

- Tu n’es pas obligé de me le dire, bredouilla-t-il. Tu viens d’où ? Euh, non ça ne me regarde sans doute pas non plus…

Cela arracha un petit rire incrédule à Draco. Le garçon eut un sourire mi-figue mi-raisin.

- Sans commentaire, marmonna-t-il.

Draco le considéra avec un peu plus d’intérêt, curieux de voir ce qui allait se passer.

- Ça se trouve tu ne parles même pas anglais…

- Je parle anglais, le rassura Draco.

Cela eut l’air de l’encourager :

- Tu viens souvent ici ?

- Non. Je suis rentré par hasard.

Il hocha la tête.

- Je viens de temps en temps. Mon ex trouvait que c’était un peu mort, mais j’aime bien leur bouffe.

Draco fit un vague signe d’assentiment.

- J’aime bien ta cape, dit-il. J’en voulais une comme ça.

- Ah oui ?

- Oui. Tu l’as trouvée où ?

- C’est du sur mesure.

- Classe.

Il semblait déjà à cours de sujets de conversation, ou bien sur le point de parler mais sans oser le faire. Il but une gorgée de bière et soudain reposa son verre.

- Tu connais le tarot ?

Draco hésita. Il connaissait la technique de Divination, bien sûr, mais c’était à un moldu qu’il avait affaire.

- Je ne sais pas…

- C’est pour lire l’avenir.

- Ah ?

Il haussa les sourcils.

- Oui, enfin, pas vraiment, mais c’est intéressant. Attends.

Il sortit d’une poche de sa veste une boîte en carton qui avait été beaucoup ouverte et refermée. Il en sortit le jeu de cartes et les ouvrit en un éventail grossier pour montrer les images à Draco.

- On tire des cartes et les images qu’on retourne nous disent des choses sur le passé, le présent et le futur, tout ce que tu veux. Tu veux essayer ?

Malgré sa prétendue froideur légendaire, Draco n’eut pas le cœur de dire non à sa mine anxieuse ; de plus, cela l’intriguait de voir un moldu faire de la divination. Il en venait à se demander s’il ne s’agissait pas en fait d’un sorcier déguisé. L’idée l’inquiétait un peu. Il en aurait bien assez vite le cœur net.

Le garçon lui fit tirer et disposer trois cartes sur la table après s’être assuré qu’il n’y avait pas de trace collante ou autre salissure, puis il lui demanda de retourner celle qui serait son passé.

- Le pendu. Alors…, euh, ça peut vouloir dire plusieurs choses…

Il s’interrompit : Draco avait blêmi. Le motif de la carte l’horrifiait. Le hasard n’allait pas le lâcher.

- Ça va ?

Draco déglutit.

- Ouais…

- C’est lié au malheur mais c’est avant tout une histoire de décision personnelle…, dit-il précipitamment – et Draco dut faire de grands efforts pour ne pas se décomposer davantage –, ça n’a pas forcément à voir avec… enfin… J’espère que…

Draco secoua la tête :

- Vas-y, le présent, qu’on rigole.

Il désigna la carte puis posa les coudes sur la table et se cacha le visage dans les mains en attendant que l’autre la retourne à sa place.

- Le six de bâtons.

Draco releva le nez, posa le menton dans sa main et jeta un oeil au dessin. Il ne se souvenait pas être déjà tombé sur ce type de lame quand Pansy, Tracey et Daphné leur imposaient des tirages, entre leur troisième et cinquième année ; les motifs symétriques, parce que peu familiers, quoique chargés, avaient quelque chose de rassurant : ils ne lui évoquaient rien, le terrain était relativement sûr. Timmy débitait des commentaires, tentant de tirer les implications plutôt négatives de la carte vers des interprétations opposées, attentif aux réactions – ou non réactions – de Draco. Moment critique, dispersion, désordre intérieur, créativité...

- Et le futur…

Mais Draco lui bloqua la carte alors qu’il allait la retourner.

- Donne-moi le jeu. On va tirer les cartes à ma manière.

Timmy retira sa main et lui tendit le paquet. Draco jeta un rapide regard à sa carte de futur avant de la remettre dans le jeu ; ça ne voulait jamais dire grand chose… Il disposa les cartes en une sorte de cercle comme il avait vaguement vu faire les filles (et puis, il avait fallu apprendre ça un jour, choisir « un mode de lecture qui correspond à votre sensibilité » – Trelawney avait toujours eu le mot pour rire).

Timmy eut l’air de plus en plus captivé.

Il voulut lui faire un nouveau tirage. Draco le vit retirer discrètement la mort et le pendu tout en mélangeant les cartes, mais n’en laissa rien paraître. Le tirage fut absurde.

- Je me suis enfui de chez moi.

Timmy hocha la tête.

- Oui, je me suis dit qu’il y avait un problème…

Il hésita, cherchant d’un regard la permission de poser la question. Draco fit « non » de la tête.

- Tu as quelque part où aller ce soir ? demanda Timmy. Non, tu es venu ici parce qu’ils ne ferment pas de la nuit…

- C’est à peu près ça.

Timmy hésita.

- Tu n’as pas l’air de me faire confiance, et puis on vient juste de se rencontrer, mais bon. Si tu veux tu peux venir crécher chez moi cette nuit. J’habite pas trop loin.

Il ne savait pas pourquoi il avait accepté, mais une bonne vingtaine de minutes plus tard, il entrait à sa suite dans un immeuble d’habitation peu glorieux. Il avait suffi de suivre. Timmy montait les escaliers en s’assurant qu’il était toujours là, l’air un peu soucieux. « L’ascenseur » était en panne.

- Désolé, c’est le bordel, attends deux secondes je…

Il disparut à l’intérieur et Draco le vit dégager des choses par l’embrasure de la porte.

- Rentre, c’est juste que…

Le blond ne fit pas trop attention au désordre qui régnait dans le minuscule appartement. Il ne s’attendait pas à des miracles. Il ne s’attendait pour ainsi dire à rien du tout. Rien dans les objets ne lui était familier ; il n’y avait absolument rien de sorcier, malgré les quelques symboles celtiques qui s’étalaient sur des posters aux murs. Aucune des photographies ne bougeait. Timmy revint vers lui pour lui faire visiter la pièce. Draco ne cessa de l’observer tandis qu’il lui décrivait ses meubles, ce qui eut l’air de le troubler un peu ; il finit par s’interrompre et lui lancer un regard interrogateur. Draco tenta sa chance : après tout, Timmy l’avait dragué toute la soirée.

Il ferma les yeux et posa les lèvres sur celles du brun. Celui-ci éleva immédiatement une main vers sa nuque pour répondre au baiser. Draco eut un léger mouvement de recul en sentant les doigts toucher son cou, mais il n’allait pas se faire étrangler. Ce n’était rien. La bouche du garçon était chaude et avait un goût de bière, et ce n’était pas désagréable. Il avait déjà embrassé un garçon un jour, sur un pari, mais jamais comme ça, sans public, avec la langue. Il se surprit à apprécier la sensation, même l’idée. Même s’il n’était qu’un moldu, et un peu pathétique, il embrassait bien. C’était excitant de l’embrasser.

Timmy l’interrompit soudain.

- Je te jure que j’avais pas… enfin, je t’ai vraiment invité à dormir ici, sans arrière pensée forcément, parce que je sais ce que… »

Draco hocha la tête et se rapprocha de lui comme s’il n’écoutait rien. Timmy gémit en retrouvant le contact de sa bouche et de sa langue ; Draco n’avait plus envie de penser et il approuva intérieurement (et peut-être un peu plus haut qu’il ne l’aurait voulu) lorsque son hôte improvisé se pressa enfin tout entier contre lui, lorsque bientôt une main commença à se faufiler sous ses vêtements et que ses paumes se mirent elles aussi à parcourir les contours bien masculins qui s'offraient à lui.

Il était resté plus longtemps que la nuit. Timmy s’était fait plaquer peu de temps auparavant et avait beaucoup de mal à supporter la solitude. Draco lui avait donné un prénom qui lui était passé par la tête et le garçon ne l’avait pas plus interrogé : il avait bien compris que c’était faux, et lorsqu’un soir il avait vu les cicatrices sur son torse, puis le tatouage informe et immonde sur son bras, il lui avait fait promettre de ne rien lui raconter – du moment qu’il n’allait pas lui faire de mal ou essayer de le convertir à quoi que ce soit – il n’était pas recherché par des trafiquants ou des fachos au moins ?

Draco était resté plus de deux mois. Timmy avait patiemment essuyé ses crises d’angoisse, lui-même ayant suffisamment d’expérience en la matière pour savoir comment réagir pour que cela n’empire pas, à défaut de pouvoir y remédier. Parfois il refusait de sortir ou même d’approcher des fenêtres, et l’autre devait l’entraîner de force, lui dire « tu vois, il ne t’arrive rien, tout va bien » – Draco faisait l’effort de l’écouter. Ils couchaient beaucoup au début, puis cela s’espaça avec le temps ; Timmy ne le mettait pas à la porte, et Draco trouvait peu à peu ses marques dans le monde moldu. Puis, un jour où ils avaient de nouveau couché ensemble, l’idée s’était insinuée dans son esprit qu’il ressemblait un peu à Harry, qu’il l’avait attiré parce qu’il avait le même air échevelé que Potter, plus ou moins la même stature, pas du tout le même regard, mais s’il fermait les yeux… La précision avec laquelle il pouvait les superposer l’avait horrifié.

Timmy eut l’air soulagé qu’il parte. Deux jours plus tard, un autocar le déposait en plein centre de Manchester.

 

 

 

 

 

 
 
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