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au 31 Mai 21 :
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Des jours et des feuilles
Par masamiya
Originales  -  Général  -  fr
5 chapitres - Rating : T (13ans et plus) Télécharger en PDF Exporter la fiction
    Chapitre 5     Les chapitres     10 Reviews    
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Tremblements

Un chapitre après une longue absence.

 

Un chapitre évènement, un chapitre cadeau...

 

 

JOYEUX ANNIVERSAIRE ELFY!! o/

 

 

Profite de ta lecture, et désolée de l'avoir fait si court:) J'espère que ça te plaira tout de même!

 

 

                                   ________________________________

 

 

La première chose que j'ai vue en me réveillant, c'était ma cuisse pâlotte, parcourue d'un réseau de veines disgracieux, et surtout la main de Clément qui reposait nonchalamment dessus.

Pas comme une propriétaire, non, il avait l'air d'utiliser le monticule de chair comme appui. Son poignet, mou, retombait sans vie au-dessus de mon épiderme, ses doigts cascadant, un ongle prêt à m'égratigner au moindre mouvement.

 

Nous avions dormi d'un sommeil de mort. Abêtis. 

 

Un rayon de lumière venait s'écraser sur nos faux futons jaunis, et soulignait leur aspect un peu crasseux. Pas de doute, j'étais revenue, et le retour avait un goût amer, entre l'échec et le déclassement. Je repensai aux draps frais, changés tous les jours dans la chambre louée par les parents de Toru, et je retirai ma cuisse de sous la main de Clément.

 

Quelle heure était-il? D'ailleurs, quel jour était-on? Le temps de me repérer un peu, et je réalisai sans surprise que Clément -assoupi, haleine fétide- aurait dû être à la fac. J'aurais pu le réveiller, mais à son âge, il était temps qu'il s'y mette un peu. Alors je me levai sans bruit, enjambai le futon d'Alex, notai que Jay n'avait pas dormi là et m'approchai du frigo.

 

Les salauds n'avaient pas fait les courses depuis des siècles, et une corbeille laissait voir des fruits déjà pourris, les mêmes que j'avais laissés en partant, ni mangés ni jetés, statiques: exactement comme moi. Le ventre creux, résignée, je roulai un pétard en me disant que ça aurait le mérite d'éveiller Clément doucement, et que je me foutais bien d'être défoncée dès les réveil puisque je ne travaillais plus.

 

J'effritai soigneusement, méticuleusement, me concentrant sur ma tâche pour ne pas penser qu'il me faudrait trouver un autre boulot. Clément dormait toujours, Alex grognait à chaque fois qu'elle entendait le bruit du briquet, et moi à même le sol et à moitié nue, j'espérais me rendormir et tout oublier- surtout, oublier mon départ raté, ma tentative d'aller vivre chez Samie avortée, mes bonnes résolutions envolées, mon retour. La montagne de choses qu'il me faudrait changer, des fruits pourris à jeter jusqu'à mon mode de vie.

Une feuille, du tabac que je trouvai près d'Alex- l'enjamber, sentir mon poids peser sur son matelas, l'entendre grogner encore, saisir le pot de tabac à rouler, retourner discrètement sur mon futon- et enfin fumer. 

Le rai de lumière se déplaçait doucement sur le corps de Clément. 

 

La matinée était calme et chaque bouffée m'aidait à le redevenir moi aussi, à digérer mon échec, à me rencentrer sur moi-même, coeur qui bat frénétiquement sous l'effet salvateur de la fumée, chair de poule qui se dresse: plus ça allait et plus le matelas me tendait à nouveau les bras.

 

J'ai fini par me recoucher, tout contre Clément.

 

Je pourrai toujours aviser à mon réveil.

 

 

                                          _____________________

 

 

 Avec Toru, on a monté les escaliers en rigolant doucement, on essayait d'étouffer nos voix et nos pas, mais on avait tellement bu, on devait faire un de ces boucans... Je me sentais comme un gosse, j'étais léger, j'avais plus peur- plus peur pour Alex, plus peur d'être seul, et je crois que je commençais à être heureux.

 

Toru était un peu comme moi, finalement; un peu autiste dans son genre, même s'il a conservé toute la soirée des rapports avec ceux qui ous entouraient, je l'ai vu faire: il les voyait au travers de son objectif, prenait des portraits d'eux étranges- une oreille, des pieds, des pieds, des pieds.

C'est comme s'il avait passé sa soirée avec moi et des paires de godasses, et moi finalement je ne me souvenais pas plus d'eux non plus, des silhouettes fondues dans le flash de son appareil, et ses yeux à lui.

 

Comme d'habitude, je gerderai plus de souvenirs de l'atmsophère: la chaleur, la sensation angoissante du pouls à l'unisson avec la musique, des corps mous et moites qui entraient en colision avec le mien, des odeurs.

Tellement d'odeurs, j'ai essayé un moment de les différencier, les reconnaître; je l'ai dit à Toru qui a ri et a essayé des les photographier- son appareil levé vers la fumée au-dessus de nos têtes, un gros plan sur une goutte de sueur, un verre renversé.

 

Et il me ramenait à l'appart, ou bien c'était moi, et les escaliers grinçaient en réponse à nos rires, j'avais à nouveau six ans, j'avais un grand frère plutôt qu'une jumelle.

 

Sourire, regard complice en arrivant devant la porte, on reste plantés là devant comme si on n'était pas montés jusques là pour entrer. Le sérieux nous reprend sans qu'on s'en aperçoive, le calme revient, on n'entend plus que nos respirations un peu rapides, à cause des escaliers. Je reste coincé devant cette porte que je n'ai plus du tout envie d'ouvrir, et Toru ne fait rien, il me regarde, il attend de voir ce que je vais faire- il ne me force par la main mais il ne m'aide pas non plus...

 

 Je pense à Alex derrière cette porte, je pense à mes peurs qu'elle traîne avec elle, je pense à Toru qui rentrera chez lui et me laissera ici- retour à la case départ. Mais puisqu'il m'a ramené autant rentrer, je suis monté jusqu'ici je peux bien pousser la porte, je bois ma coupe amère, sous mes doigts la poignée en métal glacée, et à mes oreilles le grincement du bois qui glisse contre ses charnières.

Toru toujours immobile à mes côtés a les yeux braqués sur la pièce sombre, comme moi; peut-être même aussi sur la tache blonde des cheveux d'Alex qui avaient l'air incongrus dans tout ce noir, ses cheveux sont surnaturels et aimantent le moindre rayon pour le refléter, ses cheveux qui disent: je suis là, m'appellent, me rappellent en vrac la maison de notre enfance et les étés à jouer dans la gadoue, mon affection pour elle et même l'odeur qu'elle avait avant de devenir une femme.

 

Je sens Toru lever son appareil, ça me sort de ma transe- le flash les réveillerait, je pose ma main sur son poignet et il laisse retomber le gros Nikon contre sa poitrine, ça fait un bruit mat, je le regarde et je sais que c'était l'Alex d'avant auquel je m'accrochais, maintenant elle n'a plus la même odeur, plus la même démarche, plus le même corps et même plus l'envie de partager sa vie avec moi.

Je n'ai pas eu besoin de lâcher le poignet de Toru pour refermer la porte.

 

 

                                            ____________________

 

 

Tout reposait dans la lumière douce, tamisée par les volets; la pièce était silencieuse et la fumée stagnait, tranquille, au-dessus de nos têtes. J'avais fini par me réveiller, Alex et Clément dormaient toujours profondément, comme assomés.

 

Je me dégageai de l'étreinte de Clément, qui avait profité de mon sommei pour glisser un bras autour de ma taille, et commençai à m'étirer; tous mes muscles se tendirent et je sentis un fourmillement familier et agréable se propager jusqu'au bout de mes orteils.

 

Au silence qui régnait dans tout l'immeuble habituellement bruyant et si peu isolé qu'on pouvait entendre les voisins discuter, je déduisis que l'heure devait être avancée; tout le monde était encore certainement au travail, et les enfants à l'école.

 

C'est alors que retentit la voix criarde de Britney Spears. Bon sang, Alex ne pouvait pas se choisir une autre sonnerie de portable? Qui écoutait encore Toxic, de nos jours? Elle allait réveiller toute la chambrée...

Je bondis le plus discrètement possible en direction de la sonnerie, vers l'oreiller d'Alex; je trébuchai sur un de ses pieds et j'entendis un grognement provenir de sous sa couette.

 

-Putain, Alex, t'fais chier, gémit Clément qui devait se coltiner une sacrée gueule de bois.

 

Un autre son indistinct, et un bras blanc sortirent de la couette d'Alex; la main tatonnante ne m'aidait pas franchement à trouver le portable que je débusquai sous un angle du futon avant de prendre la communication.

Aussitôt, le bras frileux se rétracta et retourna au chaud dans le duvet; Alex m'avait abandonnée avec son portable et s'était redormie sans plus de cérémonie.

 

-Allô?, lançai-je à la coque en plastique rose, hésitante. Pourquoi est-ce que je n'avais pas regardé le foutu nom affiché? Pourquoi?

 

Les colifichets en fausses pierreries suspendus au téléphone venaient cliqueter gentiment contre mes ongles, le ronflement d'Alex se faisait entendre à nouveau et Clément tentait d'ouvrir des yeux en trou de pine, se redressant sur un coude, pendant qu'une voix mâle et franchement sexy s'enthousiasmait contre mon oreille:

 

-Ma chérie, c'est vraiment une occasion unique pour ta mère et moi, et puis on passera vous voir, qu'est-ce que vous nous manquez, comment vont vos études? Jay est avec toi?

 

Bordel. Le père d'Alex? Je clignai stupidement des yeux, heureuse qu'il ne puisse pas nous voir, et songeai seulement à le détromper.

 

-Je... Je suis une amie d'Alex, désolée.

 

Un silence soudain plus lourd pesa au bout du téléphone.

 

-Alex n'est pas près de vous? 

 

Je jetai un bref coup d'oeil à la montagne de couettes ronflantes, et improvisai:

 

-Je suis désolée, elle est en cours. Elle a oublié son portable...

 

-Vous êtes sa colocataire, c'est ça? Dites-lui qu'elle nous rappelle dès qu'elle rentre, mon travail nous donne l'occasion de monter sur Paris, on pourra passer vous voir!

 

-Nous en serions ravis, mentis-je en regardant les culottes qui trainaient, la montagne de vaisselle, les cendriers remplis de joints à moitié fumés, les bouteilles vides et les futons crasseux posés à même le sol contre le mur dévoré d'humidité. Je lui dirai de vous rappeler, ajoutai-je d'une voix d'hôtesse de l'air.

 

-Vous êtes gentille. Bonne journée!

 

Sa voix était si chaude que je sentais mon corps entier fondre comme de la bougie.

 

-Au revoir, minaudai-je sous les yeux ébahis de Clément qui ne me voyait pas faire du charme au téléphone tous les quatre matins.

En raccrochant, je fis mentalement le bilan: on était dans la merde si les parents d'Alex venaient ici, et surtout s'ils venaient bientôt; son père avait une voix si sexy qu'il devait être un véritable Apollon- je l'imaginai avec les mêmes gènes qu'Alex: blond, les yeux clairs, une peau parfaite; et il fallait absolument qu'on trouve où Jay était passé avant que ses géniteurs débarquent.

 

Je lorgnai désespérément sa soeur profondément endormie et indifférente à ce qui se déroulait à côté d'elle, la première concernée. Clément avait commencé à s'étirer avant de se trainer à la salle de bains. Je regardais ses jambes maigrichonnes sortir de son caleçon comme des cannes, et je me demandais ce que je trouvais à ce foutu con, quand il me fit un sourire éblouissant au travers du miroir de la salle de bains.

-Je me passe un peu d'eau, et je reviens. Retourne te coucher!

 

Clin d'oeil coquin de clément qui se pencha au-dessus du lavabo et me donna à regarder ses hanches, ses fesses. Mmh. Je pouvais m'y habituer. 

Il semblerait qu'il n'ait pas oublié hier soir, et il avait l'air de bonne humeur, compte tenu du mal de crâne qu'il devait se coltiner. Je souris à son fessier et retournai dare-dare dans mon futon, bousculant à nouveau la jambe d'Alex, trébuchant sur ses couettes d'impatience, joyeuse soudain.

 

J'étais enfin avec Clément, on aurait dit un petit couple, et notre taudis se transforma en paradis sous ma vision subjective et amoureuse.

Même l'absence de porte entre notre séjour et notre salle d'eau me semblait une coïncidence merveilleuse. Clément passa une main sur son visage humide, sans prendre la peine de s'essuyer avec une serviette, et revint s'installer à côté de moi, le visage et les cheveux nimbés de goutelettes. Mais il s'installa sans se glisser sous la couette.

Je masquai ma déception.

 

-Alors, c'était qui, sur le téléphone d'Alex?

 

-Son père, répondis-je évasive. Est-ce qu'il voulait savoir ça parce qu'il était encore intéressé par elle, ou tout simplement était-il un peu jaloux du ton enjôleur que j'avais utilisé pendant le coup de fil?

Je décidai de me concentrer sur le positif et balayai mes idées noires. Après tout, il faisait beau, de ce que je voyais au-travers de nos volets qui fermaient mal, et la journée commençait bien.

 

-Il va venir?

 

Le ton est un peu inquiet, il a froncé les sourcils. J'aime bien son air sérieux, aussi.

 

-Moui, je sais pas trop quand, Alex doit le rappeler.

 

Soit parce qu'elle avait entendu son prénom, soit parce qu'elle percevait directement les ondes d'angoisse qui semblaient émaner directement de Clément, elle cessa de ronfler. Est-ce qu'on l'avait réveillée?

On a tourné nos têtes vers la forme enfouie sous le monticule de couettes. Pas un son, mais pas un mouvement.

S'il y a un Dieu, faites qu'elle ne se réveille pas, je veux profiter de la présence de Clément.

 

Quelques secondes s'écoulèrent, le sourire coquin était revenu sur les lèvres fines de mon Jules, je me détendais, et la tête d'Alex choisit cet instant pour émerger.

 

-T'coup d'fil p'moi?

 

Elle était décoiffée à faire peur, mais même comme ça elle était adorable. Belle comme une enfant.

 

-Oui, ton père.

 

-Fallait lui passer Jay...

 

Elle commençait à se réenrouler dans son cocon, je la stoppai:

 

-Il n'est pas rentré.

 

Je devais avoir trouvé une sorte de formule magique, parce que je ne l'avais jamais vue se réveiller aussi rapidement. C'est comme si toute sa fatigue avait pu se méamorphoser en inquiétude, comme si j'avais appuyé sur un point douloureux.

Je voyais dans ses yeux fouillant la pièce qu'elle ne me croyait pas, je voyais la panique monter en elle, sa respiration de belle endormie s'accélérer- elle avait perdu plus que son frère, elle avait perdu une habitude, un animal de compagnie, on avait retiré un vieux meuble de l'appartement.

Il avait fallu qu'on lui ôte pour qu'elle se rappelle sa présence et se décide à lui accorder de l'importance. Je suivis des yeux la progression de sa panique- elle se levait, commençait à l'appeler dans la cage d'escaliers. Je pensai qu'elle l'avait bien mérité et accordai un sourire de connivence à Clément- mais il me toisa.

 

Quoi? Je n'étais tout de même pas coupable de la disparition de Jay! A qui la faute, si sa soeur n'était pas foutue de faire attention à lui?

 

Je regardai impuissante Clément tenter d'aider Alex, lui suggérer des endroits ou chercher son frère, une mise en oeuvre pour le retrouver; je suivis vaguement, tétanisée par autant d'hypocrisie, la démarche qui se voulait apaisante de cet espèce d'irrécupérable amoureux transi, qui se démenait au milieu de la plus parfaite indifférence d'Alex.

 

Il faudrait certainement que Clément se faire écraser pour qu'elle lui prête attention, et forte de cette idée, je me détournai de leurs soucis.

 

Pour peu de temps.

 

La voix nasillarde, pleureuse, d'enfant stupide et gâtée d'Alex me résonna aux oreilles. Elle tomba face à mon futon comme si j'étais le messie, et supplia:

 

-Lia. Aide-moi à le retrouver.

 

Bordel. J'aurai certainement devoir la guider jusqu'à la maison d'hôtes dans laquelle Toru  m'avais hébergée. J'étais pas prête de me dégoter un travail.

 

 

                                                   _______________

 

Voilà tout pour aujourd'hui. La suite un de ces quatre- les anniversaires se font rares!

 

Encore un très joyeux anniversaire à n'Elfy qu'on adore tous, et qui mérite bien des cadeaux pour ce beau jour!

 

Merci à MZ de le publier pour moi. (MZ, tu es la femme de la situation!)

 

Et merci d'avoir lu :)

 
 
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