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au 31 Mai 21 :
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Chamane
Par haniPyanfar
Harry Potter  -  Romance/Action/Aventure  -  fr
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    Chapitre 26     Les chapitres     20 Reviews    
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Le pays blanc

 

Chamane 26 Le pays blanc

 

« Qu'est-ce qui se passe ? questionna Neville en voyant les Guérisseurs discuter entre eux en ayant presque l'air de se disputer.

 

-Il y a un problème, répondit Maître Dlima tout en écrivant à toute vitesse avec son stylet magique. La guérison de Harry était en bonne voie mais il s'est endormi si profondément que nous ne parvenons pas à le réveiller. Son esprit s'est, semble-t-il, déconnecté de la réalité et doit vagabonder dans des rêves un peu délirants.

 

-Comme quand on est sous l'effet d'une drogue ? reprit vivement Draco. Harry m'a dit que quand il avait avalé quelques gouttes de votre « Potion des Fêtes », il avait eu l'impression de planer. Moi aussi ça m'est arrivé d'ailleurs, le soir où la troupe des musiciens a chanté et dansé. C'est peut-être trop fort pour nos organismes d'Européens. Et Harry en a pris plusieurs fois avec la tisane aux trois pétales.

 

-Essayons nos remèdes à nous, proposa Neville. Lançons ensemble un « Enervatum »

 

Mais le sortilège n'eut aucun effet. Harry respirait de plus en plus faiblement et quand Draco tâta son pouls, il sentit son cœur battre très lentement, beaucoup trop lentement.

 

-J'ai apporté de la pervenchère, tu sais « l'aiguise-méninges ». Ça pourrait marcher, reprit Neville avec nervosité. Tu as une autre idée ?

 

Ce fut alors que Maître Ndiapo se tourna vers eux.

 

-Nous avons commis une grave imprudence, dit-il avec une certaine gêne. Nous avons seulement pensé à guérir le corps de Harry. Mais nous n'avons pas mis un Gardien sur son esprit. Il est entré dans une sorte de coma et il ne peut plus s'en sortir seul. Il faut que quelqu'un aille le chercher là où il s'est égaré.

 

-J'irai, dirent les deux sorciers anglais d'une seule voix.

 

Ils se regardèrent, un peu étonnés d'avoir réagi aussi vite et ensemble. Mais déjà Draco se tournait vers les Guérisseurs et ajoutait :

 

-Harry m'a appelé dans son sommeil, j'ai clairement entendu sa voix. C'est ce qui m'a réveillé. Je dois l'aider. Que puis-je faire ?

 

Maître Ndiapo le regarda curieusement puis il hocha la tête.

 

-Nous avons une potion que nous utilisons dans les cérémonies de mémoire. Elle relie l'esprit qui voyage à un Gardien qui le surveille, prêt à le ramener s'il s'éloigne trop ou s'il se perd. Cette fois ce sera un peu plus compliqué. Il faudra d'abord retrouver l'esprit de Harry, puis le ramener vers la porte de sortie. Ce sera un peu dangereux, il pourrait résister et vouloir entraîner son Gardien à sa suite. Le plus fort des deux gagnera.

 

-C'est à moi de le faire, insista Neville. Je suis son ami. Il m'écoutera.

 

-Non, Neville, répondit Draco et c'était la première fois qu'il employait le prénom du Griffondor. Harry a changé, je le connais maintenant mieux que toi. Je vais le chercher. Je sais comment le ramener. Donnez-moi votre potion, Maître Ndiapo. Il n'y a pas de temps à perdre.

 

-Bien, décida le guérisseur.

 

Il expliqua rapidement la situation à ses trois confrères, sortit une petite gourde noire de son sac et la tendit au Serpentard en expliquant. :

 

-Tu vas boire ceci jusqu'à la dernière goutte puis tu t'installeras à côté de Harry. Il faut que vous soyez aussi proches l'un de l'autre que possible. Tu te sentiras partir et tu te retrouveras probablement dans le même monde que lui. Si ce n'est pas le cas, cherche-le et trouve-le. Ensuite à toi de le convaincre. Demblé jouera de la musique pour te garder en notre compagnie et te guider sur le chemin du retour. Tu as une heure. Passé ce temps, je te réveillerai avec ou sans Harry. Il sera alors trop tard pour lui. Toujours d'accord ?

 

-Oui, répondit Draco d'une voix ferme.

 

Il prit la petite fiole et la but sans hésiter puis, à la grande surprise de Neville, il se glissa sous le drap de soie et la fourrure, il prit Harry dans ses bras et le serra tout contre lui. Au bout de quelques instants, il se sentit partir et son « voyage » commença.

 

o – o – o – o

 

Il marchait dans une sorte de brouillard lumineux qui commença à se dissiper comme sous l'effet d'une brise fraîche mais il ne voyait pas ses pieds. Il avait l'impression d'avancer sur un nuage. Petit à petit, un décor se dessinait, des ouvertures en ogives apparaissaient un peu partout, des fenêtres, des portes, certaines proches, d'autres lointaines. Ça ressemblait vaguement à l'intérieur du château de Poudlard, sans les murs. Il y avait aussi des bancs et des arbres, le saule cogneur, le hêtre tortueux et bizarrement des palmiers Hyphaènes, tous beaucoup plus petits que les vrais. Bizarrement, tout était d'un blanc pur. Aucune couleur, aucun repère. Personne. Pas de Harry. Juste une musique lointaine un peu entêtante, des chants d'oiseaux, un bourdonnement d'abeilles et tiens ! un petit fennec albinos enroulé sur un banc.

 

Draco commença à appeler mais sa voix lui parut cotonneuse. Elle ne portait pas. Il s'approcha d'une fenêtre, elle ne donnait sur rien. Il voulut passer une porte mais un lourd rideau tomba et l'empêcha d'avancer. Il se sentait oppressé. Quel drôle d'endroit ! Si Harry était ici, il devait le retrouver très vite et le sortir de là. Il avança encore et appela de nouveau. Le brouillard s'enroulait en volutes autour de lui. Et soudain, devant une porte, il y avait Harry. Draco faillit éclater de rire. Le Griffondor était pratiquement nu, il portait juste une sorte de petit slip, un morceau de tissu coloré noué serré sur ses hanches. Il essayait de soulever le lourd rideau qui fermait la porte. Il lui tournait le dos.

 

-Harry ! appela-t-il. Le jeune homme se retourna. Il avait toujours ses cheveux bruns ébouriffés, ses yeux verts et son sourire désarmant. Enfin un peu de couleur dans tout ce blanc !

 

-Draco ! s'exclama-t-il. Content de te voir ! Je t'ai appelé tout à l'heure mais tu n'as pas répondu. Viens ! A nous deux on va pouvoir écarter ce rideau. Je crois qu'il y a du soleil derrière. Ce doit être le Jardin d'Eden. Ça fait un moment que je le cherche.

 

-Harry, non, c'est un piège. Viens avec moi, il faut rentrer à la maison.

 

-Il n'y a rien à la maison. Tu n'es jamais là, reprit Harry d'un ton boudeur.

 

-Je suis là maintenant, viens.

 

-Non tu n'es pas là. C'est encore un rêve.

 

-Je suis là, je te dis ! Allez ! Cesse de faire l'enfant ! Prends ma main ! On s'en va !

 

-Pourquoi ? On est bien ici. On va s'asseoir sur un banc. Tu me donneras un baiser et alors je te croirai.

 

-On n'a pas le temps Harry. Il faut trouver la sortie et rentrer.

 

-Il n'y a pas de sortie Draco, j'ai déjà cherché. Et puis je n'ai pas envie de rentrer. Pour quoi faire ? Reste ici avec moi. On s'embrassera, on s'aimera. Toujours.

 

-Non je ne t'embrasserai pas. En tout cas pas ici. Viens ou je m'en vais. Pour toujours.

 

Il se détourna et commença à s'éloigner. Juste un peu. Il sentit la présence de Harry derrière lui.

 

-Et où veux-tu aller, pauvre idiot ? murmura une voix câline à son oreille. Tout est pareil ici. Regarde autour de loi. Des portes, des fenêtres, des bancs, c'est tout. Allez, viens t'asseoir près de moi. Je t'aime tu sais. Je ne pourrais pas te le dire de l'autre côté. Je ne pourrais pas non plus t'embrasser. Alors pourquoi partir ?

 

-Si je te promets de t'embrasser quand nous aurons trouvé la sortie, viendras-tu avec moi ? suggéra Draco d'une voix charmeuse.

 

Le temps pressait, toutes les ruses étaient bonnes.

 

-On peut toujours chercher si ça te fait plaisir. Mais je n'ai pas envie de retourner de l'autre côté. Il y fait froid. Ici, il fait bon. Tu n'as pas trop chaud avec tous ces vêtements ?

 

Le ton était étrangement suggestif. Harry était tout près. Draco l'attrapa par la taille et le tint tout contre lui. Dans ce monde irréel, le corps nu, mince et chaud du Griffondor était une réalité tangible et aussi terriblement tentante. Il souffla tout contre son cou :

 

-Je connais un bon moyen de te réchauffer, Griffon. Mais d'abord, sortons d'ici. Près de l'endroit par où je suis entré, j'ai vu un petit fennec ... Tiens le voilà ! Et tu entends cette musique ? C'est Demblé qui nous appelle ! Viens ! Vite !

 

Devant eux se dressait tout à coup un grand portail semblable à celui de Poudlard, avec de hautes grilles blanches qui s'ouvraient lentement. Mais Harry résistait.

 

-Tu m'embrasseras, tu le jures ?

 

-Oui, tête de mule ! Je le jure par le Sang de Serpentard ! Viens !

 

o – o – o – o

 

Draco ouvrit brusquement les yeux. Maître Ndiapo était penché sur lui, prêt à le secouer par l'épaule semblait-il. A côté de lui, Neville avait l'air épouvanté. Au pied du lit, les trois Guérisseurs guettaient son réveil, le visage soucieux. Demblé abaissait sa flûte et les fixait, lui et Harry … Harry qu'il entendait soupirer et qui remuait doucement dans ses bras. Il le lâcha aussitôt et se jeta hors du lit, regardant autour de lui avec un air un peu égaré.

 

-Qu'est-ce qui s'est passé ? J'ai dit quelque chose ? Qu'est-ce que j'ai fait ?

 

Oh Merlin ! Pourvu que ce soit seulement un rêve dû à la drogue !

 

-Rien ! répondit Neville. Ça fait presque une heure que vous ne bougez ni l'un ni l'autre. Nous avons cru … Enfin vous êtes réveillés. Harry ! Harry ! Comment tu te sens ?

 

Draco recula un peu dans l'ombre. Son cœur battait fort et vite. Il ne s'était rien passé à part un « voyage » intérieur déclenché par la potion de mémoire. Un soupir de soulagement lui échappa. Les autres personnes se pressaient autour du lit. Il pouvait reprendre une contenance plus assurée. Mais quand même, il avait eu peur ! Peur de ne pas pouvoir ramener Harry parmi les vivants et aussi peur d'avoir un peu trop montré son … attachement pour le Griffondor. Et lui, Harry, se souvenait-il de leur rencontre dans « le pays blanc » ? Il l'entendit répondre aux questions d'une voix lente.

 

Oui il se sentait bien. Encore un peu engourdi peut-être ? Non, il ne ressentait pas de brûlure quand on le touchait. S'il avait soif ? Faim ? Oh oui, il avait faim ! Mais pourrait-il manger ? Et où était Draco ? Cette dernière question fit grand plaisir au Serpentard. Il s'avança en souriant, de ce drôle de sourire qui ressemblait à un rictus amusé.

 

-Je suis là, Griffon, répondit-il d'un ton badin. Alors comme ça tu es guéri ? Raaaah ! Un venin tout noir est sorti de ton corps ! Répugnant ! Mais maintenant tu as le teint frais comme la rose. Par contre, tu es bien maigrichon. Quelques galettes au miel ne te feraient pas de mal pour te remplumer un peu …

 

Et comme si ces paroles avaient donné un signal, les quatre feux se rallumèrent, le cercle de flammes réapparut puis s'éteignit. Ama Saé était là, accompagnée de Maître Félaro et de deux de ses suivantes qui portaient des plateaux chargés de boissons et de gâteaux. On allait se restaurer un peu puis chacun regagnerait son lit pour se reposer après cette longue nuit. La lune avait fini sa course, elle avait accompli son œuvre bienfaisante. Le malade était enfin guéri. Le soleil allait bientôt se lever pour une heureuse journée.

 

Et Harry pouvait enfin déguster une galette au miel. Presque aussi bonne que la tarte à la mélasse !

 

o – o – o – o

 

Il avait dormi quelques heures mais il n'avait plus sommeil. Il faisait jour. Il voyait la lumière derrière ses paupières closes. Il était dans sa chambre où les meubles avaient repris magiquement leur place. Après la collation impromptue, tout le monde était parti. Neville et Draco l'avaient aidé à se mettre au lit car il se sentait encore un peu faiblard. Puis ils avaient regagné la case hôtel. Lui avait sombré dans un sommeil sans rêves. Mais maintenant il était réveillé. Il essayait de se souvenir de ce qui s'était passé la nuit dernière.

 

Voyons … Il avait avalé plusieurs fois diverses potions. Ça s'était à peu près bien passé sauf au moment des œufs d'oursins … Beurk ! Quel goût épouvantable ! … Son bras lui avait fait mal pendant un moment. Il sentait encore une petite douleur là où l'oursin l'avait agrippé … Puis bizarrement, il s'était retrouvé à Poudlard, mais un drôle de Poudlard tout blanc. Il était nu ou presque … avec juste ce petit truc qu'il avait fabriqué avec un carré de soie … Il était bien. Il partait en voyage. Très loin … Et puis Draco l'avait appelé … Draco ! Qu'est-ce qui s'était passé avec Draco ? Il avait le vague souvenir de lui avoir demandé … de lui avoir dit …

 

Harry ouvrit brusquement les yeux, sentant une rougeur brûlante lui monter aux joues. Il se redressa … et s'aperçut qu'il n'était pas seul. Le garnement aux multiples bêtises était assis en tailleur sur le tapis, à quelques pas de lui. Il le reconnut même sans ses lunettes. Pour une fois, le gamin n'avait pas sur son noir visage un sourire fendu jusqu'aux oreilles, il ne pleurnichait pas non plus comme quand il s'était fait mal pour la énième fois. Il était assis bien droit, l'air sérieux comme un enfant modèle. Son bras droit était marqué par trois coupures mais il ne saignait pas. Il tenait dans ses mains posées sur ses genoux un petit paquet enveloppé d'un mouchoir.

 

-Qu'est-ce que tu fais là, toi ! s'exclama Harry pris par surprise. Qu'est-ce que tu veux. ? On n'entre pas comme ça chez les gens !

 

-C'est l'arbre qui m'envoie, répondit le gamin, pas gêné pour un sou.

 

-Quoi ? Quel arbre ? fit Harry, décontenancé par la réponse.

 

Il s'assit au bord du lit et appela ses lunettes d'un geste rapide. Il portait l'un de ses pyjamas de soie et il se demanda qui l'avait aidé cette nuit à l'enfiler.

 

-L'arbre aux fruits dorés, reprit son jeune visiteur. Il m'a dit de t'apporter ses derniers fruits. Ils sont trop mûrs mais ils sont bons. J'en ai mangé un. La peau est juste un peu dure.

 

Il ouvrit son paquet, il contenait quatre fruits jaunes un peu ratatinés.

 

-Les arbres ne parlent pas, reprit Harry en toute logique. Et puis, ces arbres-là sont très dangereux, continua-t-il d'un ton alarmé car il avait reconnu des mirabilis. Tu es entré dans leur verger ?

 

-Ben oui ! L'arbre aux fruits m'a appelé.

 

-Et comment je te prie ? Il a ouvert sa grande bouche et il a dit ton nom ? Tu t'appelles comment d'abord ?

 

-Mimosa, répliqua le gamin. Mais non bien sûr, il a pas dit mon nom ! Il m'a fait signe avec la branche aux fruits.

 

-Et il t'a laissé approcher … Mon ami Draco m'a dit que ces arbres ont des épines grandes comme le doigt et que les feuilles sont coupantes comme des rasoirs. D'ailleurs tu t'es fait blesser, encore une fois !

 

-C'est pas l'arbre qui m'a fait ça. C'est quand j'ai repassé la barrière. Tu sais, je l'ai vu, le monsieur aux cheveux comme le soleil. Il est beau.

 

-Oui, bon ! Ça ne me dit pas ce que tu fais ici.

 

-L'arbre m'a dit de venir te voir. Il a parlé dans ma tête. Il m'a dit de prendre les fruits. C'est pour faire un troc avec toi.

 

-Un troc ? Mais qu'est-ce que tu veux en échange.?

 

-Etre chamane. Comme toi. Sinon je suis mort.

 

-Quoi ? Qu'est-ce que tu racontes? s'exclama Harry qui trouvait la situation complètement délirante.

 

-C'est ma prochaine bêtise. Je tombe dans le puits. L'arbre me l'a montré dans ma tête. Mais pas si je suis chamane. Alors je serai sage et ma mère ne va plus pleurer. Je troque trois fruits dorés. Tu me fais chamane ?

 

-Mais je ne sais pas comment faire ! Pour moi, c'est venu comme ça, parce que je me suis fait piquer par l'oursin !

 

-Et moi, je me suis fait piquer par les orties. Tu m'as guéri en prenant le venin. Tu as eu mal, je l'ai vu. Tu vas le remettre dans mon bras. Comme ça, tu me feras chamane.

 

Harry en resta bouche bée. Cet enfant que tout le monde décrivait comme un gosse insupportable raisonnait avec une logique imparable. Mais il y avait un hic. Après sa guérison, était-il toujours capable de soigner les plaies et les brûlures ?

 

-Mimosa … dit-il. Tu as un joli nom. Chez moi, c'est le nom d'une fleur. Tu sais, cette nuit, les Guérisseurs ont fait une cérémonie pour me guérir. Je ne suis peut-être plus chamane.

 

-Essaye, tu verras bien, fit le gamin en tendant son bras blessé.

 

Comment dire non? Harry s'agenouilla à côté de lui et posa la main sur les trois coupures. Mais au lieu de sentir le mal entrer en lui comme les autres fois, il ressentit une brusque chaleur. Ses yeux se fermèrent et il vit … dans sa tête … Il vit sa magie … un flux brumeux … d'un rouge orangé vibrant … couleur de flammes … qui tournoyait lentement et se répandait dans son corps. De temps en temps apparaissait une mince écharpe d'une autre couleur, verte, blanche, violette, jaune. Elle tournait lentement puis disparaissait. Et puis une traînée d'un bleu vif surgit, plus intense que les autres. Et Harry sut que c'était son pouvoir de chamane qui se manifestait. Cela fit comme un ruban ondulant qui suivit son bras droit, jusqu'à sa main posée sur le bras du gamin, là où se trouvaient les blessures.

 

Mimosa était un jeune sorcier. Sa magie était faible. Dans la tête de Harry, elle apparut en jaune pâle. Le bleu y entra d'un coup, sans pourtant se mélanger avec l'autre couleur. Harry sentit le flux courir le long du bras, gagner le cerveau et se répandre dans tout le corps du jeune garçon. En même temps, celui-ci poussa un cri, mais ce n'était pas de la douleur, plutôt de la surprise. Il eut un brusque sursaut et la main de Harry retomba. Il ouvrit les yeux et comprit. Son pouvoir de chamane s'était scindé en deux. Lui l'était encore et Mimosa l'était aussi. La magie ne se donne pas, elle se partage. Le jeune garçon avait l'air émerveillé. Il regardait alternativement son bras et Harry. Ses trois coupures se refermaient, sa peau noire était lisse, sans la moindre cicatrice.

 

-Je suis chamane ? murmura-t-il d'un air étonné.

 

-Je crois, oui, répondit gravement Harry. Maintenant tu n'es plus un jeune garçon étourdi. Tu as un don qui te servira à aider les autres. Le seul défaut, c'est que tu ne pourras rien faire pour toi-même si tu te blesses de nouveau. Alors fais attention. Je parlerai aux Guérisseurs, je leur dirai ce que nous avons fait. Tu verras avec eux les maladies que tu pourras guérir … Attends ! Veux-tu essayer sur moi ? Là où l'oursin m'a piqué, il reste une plaque rose pas très jolie. Tous les crochets d'épines sont sortis. Il n'y a plus de danger. Veux-tu tester ton nouveau pouvoir ?

 

Harry tendit son bras droit. Le jeune garçon n'hésita pas. Il posa sa main sur la marque.

 

-Ça picote, dit-il, mais ça ne fait pas mal.

 

Quand il ôta sa main, la plaque rosâtre rétrécit jusqu'à ne former qu'un point qui disparut à son tour. Ils se regardèrent un moment sans parler, en souriant de plaisir. Puis Mimosa tendit son mouchoir déplié et dit d'une voix joyeuse :

 

-Trois fruits dorés pour toi ! Un pour moi ! Un bon troc !

 

Il posa trois mirabilis sur la table près de Harry et sans attendre, il mordit dans le fruit restant. Puis il se leva d'un bond, le jus dégoulinant sur son menton et ajouta :

 

-Merci Maître Harry. Je vais parler à ma mère.

 

Il s'en fut en gambadant. Harry resta un moment immobile puis il sentit la fatigue tomber sur lui. Les autres devaient encore dormir. Il se recoucha et sentit le sommeil revenir comme s'il venait de faire un très gros effort. Sa dernière pensée avant de sombrer fut :

 

« De quelle couleur peut bien être la magie de Draco ? Est-ce qu'elle est orangée comme la mienne ou est-ce qu'elle est verte ? »

 

o – o – o – o

 

« Tu … tu pars demain matin ? murmura Harry en fixant Draco d'un regard incrédule.

 

Ils étaient tous les deux dans sa chambre à la Grande Case. Le Serpentard venait d'y reconduire son camarade Griffondor un peu pompette. Et le moment des adieux était arrivé.

 

Dans l'après-midi, l'ex-malade avait été interrogé par les Guérisseurs et Maître Ndiapo sur tout ce qu'il avait ressenti pendant la cérémonie de guérison. Il avait dû répondre très précisément à de nombreuses questions mais il était resté évasif sur ce qui s'était passé pendant son semi-coma. Non, il ne se souvenait pas de grand chose à part que ça ressemblait à son ancienne école. Il était seul puis Draco était arrivé. Il avait pris sa main. La musique les avait appelés … Maître Dlima prenait des notes d'un air affairé. Maître Ndiapo écoutait de toutes ses oreilles. Il donnerait tous les détails à Gammla qui les transcrirait dans le livre de la famille. Il avait une excellente mémoire.

 

Harry en avait profité pour parler de la visite surprise de Mimosa. Les Guérisseurs avaient paru septiques, surtout à propos de l'arbre parlant. Mais après tout, c'était possible. Les Mirabilis communiquaient peut-être avec les Namibiens et ceux-ci n'en avaient jamais rien dit. Secrets de clan sorcier sans doute. Par contre, que Harry ait transmis son don à un habitant de Ghanzi-Sa les avait réjouis, même s'il s'agissait d'un chenapan comme Mimosa. Mais ça lui mettrait sans doute du plomb dans la cervelle. Ada Ohalva avait dit qu'il s'occuperait personnellement du nouveau jeune chamane.

 

Les formalités accomplies, Harry avait décidé de rejoindre Neville et Draco à leur hôtel et de dîner avec eux. Il portait avec plaisir un jean et un tee-shirt qu'il avait défroissés d'un simple sort. Et il était enfin débarrassé des dures socques de bois ! Il n'imaginait pas la petite révolution que son arrivée allait provoquer ! En moins d'une heure, la cour de la case hôtel était pleine de gens venus le féliciter pour sa guérison. Maître Ndiapo était là, avec Offentsé et Demblé, et tout à coup d'autres musiciens étaient apparus, Madibo à leur tête. Les libres sorcières n'étaient pas en reste. On commença à porter des toasts, à chanter en claquant dans les mains et puis certains, certaines se mirent à danser. C'était une fête improvisée, joyeuse et bon enfant. Tout le monde avait envie de s'amuser, Harry en particulier. Les bons moments lui avaient beaucoup manqué.

 

Seul Draco n'était pas très à l'aise. Son bagage était prêt. Il avait prévenu Dame Elizéa. Elle avait paru désolée mais elle avait donné sa parole. Elle serait présente dès le lever du jour à la Porte de l'Est avec deux droma. Il avait aussi « libéré » Uuuiu en la caressant et en lui montrant le Nord. La petite chauve-souris était partie rejoindre sa colonie dans la caverne du gros rocher. Il ne restait à Draco qu'une pénible corvée : annoncer son départ imminent à Harry. Ça lui faisait mal d'y penser, vraiment mal, car il avait décidé de couper les ponts avec le Griffondor.

 

Il lui était trop attaché d'une part – beaucoup trop attaché ! - et d'autre part, il ne voulait surtout pas que Harry se croit obligé de lui être reconnaissant pour ce qu'il avait fait. Si au début, il y avait été contraint par les circonstances, ensuite il avait pris plaisir à œuvrer pour la guérison de son ex-ennemi. Une sorte d'amitié s'était créée entre eux mais ça ne pouvait pas aller plus loin. Harry était hétéro. Ce qu'il avait dit pendant leur « voyage au pays blanc », à savoir qu'il voulait l'embrasser parce qu'il l'aimait, c'était juste un délire dû à la drogue. Mieux valait donc rompre les liens avant même qu'ils n'existent.

 

Draco était tout de même content d'avoir pu assister à la fête de ce soir. Harry semblait si heureux, si surpris aussi que les gens se déplacent pour chanter, danser et boire en son honneur. Maintenant, il faisait nuit, ils étaient remontés vers la Grande Case en marchant tranquillement côte à côte. L'ex-malade avait un peu trop bu mais pas autant que Neville qui n'avait pas l'habitude et avait été reconduit dans sa chambre en tenant à peine sur ses jambes. La boisson qui avait généreusement coulé n'était heureusement pas la « Potion des fêtes » mais une sorte de vin de fruits servi frais qui tournait rapidement les têtes. Draco n'en avait bu qu'un verre mais pour Harry, les toasts s'étaient succédés et il valait mieux le raccompagner jusqu'à sa chambre. Et lui annoncer son départ sans en faire un drame.

 

La petite phrase avait tout de même fait au jeune homme brun l'effet d'une douche froide. L'instant d'avant, il pouffait de rire en repensant à Neville s'essayant à la danse africaine, puis les mots l'avaient frappé au cœur.

 

« Je vais te dire adieu maintenant, Harry. Je serai certainement parti demain quand tu te réveilleras.

 

D'un seul coup, le Griffondor avait été dégrisé.

 

-Tu … tu pars demain matin ? avait-il bégayé.

 

-Je travaille Harry ! Mes employeurs m'ont accordé ces quelques jours de congé supplémentaires soi-disant pour que j'aille chercher le diamant perdu de ma mère. Mais c'est surtout parce que je dois aller d'urgence en Afrique du Sud pour une vente particulière. Londubat va rester avec toi jusqu'à ce que tu puisses rentrer à Londres.

 

-A Londres, oui bien sûr … avait murmuré Harry mais il ne savait plus très bien ce qu'il disait. A Londres ! avait-il repris avec plus d'enthousiasme. Oui, on se reverra à Londres ! C'est vraiment dommage que tu ne puisses pas rester. Mais je comprends. Ça ne fait rien. Dis-moi où je pourrai te joindre quand je serai rentré. Moi j'habite la maison que Sirius m'a légué, square Grimmault. Je l'ai fait aménager avant de partir en voyage. C'est dans un quartier moldu. Et toi, tu habites où ?

 

Ce serait finalement plus difficile que prévu.

 

-Qui te dit que je souhaite te revoir quand tu seras à Londres, Potter ? répliqua Draco froidement.

 

Le ton de la voix et l'emploi de son nom de famille figèrent le sourire sur le visage de Harry. Il y eut un silence tendu. Puis le jeune homme brun reprit à voix basse :

 

-Que veux-tu dire ?

 

-Simplement que Londres n'est pas Ghanzi-Sa. Ici nous pouvons presque être « amis ». Mais là-bas, nous serons deux étrangers. Tu auras à peine posé le pied par terre que tout changera pour toi. Tu seras entouré, fêté, accueilli comme un héros. Tu retrouveras tes amis, tu reprendras ta vie d'avant. Tu oublieras vite les mois passés en Afrique, d'autant qu'ils n'ont pas été très agréables pour toi. C'est ça l'effet des séjours dans les pays lointains, les souvenirs pâlissent vite. Il en sera de même pour moi. Dès que je serai à Johannesburg, je ne penserai plus qu'aux diamants. Ce sont des pierres envoûtantes, crois-moi. Et si un jour par hasard, nous nous croisons dans Londres, nous irons boire un thé et nous évoquerons notre séjour ici avec juste un peu de nostalgie et une pointe de regrets. L'histoire s'arrête là.

 

-C'est tout ?

 

-Oui. Adieu Potter … Adieu Harry. Ce furent de beaux jours.

 

Il n'avait pas pu s'en empêcher. Dans l'ombre de la case, à peine éclairée par quelques bougies, le visage du Griffondor était d'une blancheur de craie. Et lui avait le cœur serré. Qui avait-il voulu convaincre par sa longue tirade, lui ou Potter ? Maintenant le mal était fait. Il devait partir. Vite. Il se détourna et marcha vers la porte. Mais une main lui crocheta l'épaule et le fit se retourner. Une voix furieuse siffla à son oreille :

 

-C'est tout vraiment ? Tu as oublié quelque chose Malfoy ! Serais-tu parjure en plus d'être détestable ? Par le Sang de Serpentard … ça ne te dit rien ?

 

Ce fut au tour de Draco de pâlir. Il eut peur tout à coup. S'il embrassait Harry, il n'était pas sûr de pouvoir garder sa ligne de conduite et rompre leur amitié naissante. Ou alors … en bluffant peut-être ? Il attrapa son vis-à-vis par les épaules et lui colla deux baisers rapides sur les joues. Il passa la porte et s'éloigna à grandes enjambées. Mais quand il arriva au milieu de la cour, ce fut plus fort que lui. Il rebroussa chemin. Harry était resté à la porte de sa chambre, immobile et si pâle … Il le rejoignit et sans rien dire, il le prit dans ses bras. Il sentit le soupir de soulagement du Griffondor sur ses lèvres quand il commença à l'embrasser.

 

Au début, il s'efforça d'être seulement doux et tendre mais plus le baiser se prolongeait, plus il devenait passionné. Leurs corps pouvaient enfin se toucher sans l'impalpable barrière de la cape. Leurs mains se crispaient, celles de Harry dans le dos de Draco, celles de Draco sur la nuque de Harry. Leurs cœurs tambourinaient en harmonie … tdoum tdoum ... Leur esprit s'évadait pendant que la chaleur montait dans leur ventre … Leurs lèvres se séparèrent car ils étaient sans souffle mais ils restèrent pendant de longues minutes dans les bras l'un de l'autre, la joue de Harry sur l'épaule de Draco, celle de Draco contre les cheveux de Harry.

 

-Adieu Harry, chuchota enfin le blond.

 

-Je t'aime Draco, fut la réponse murmurée.

 

Le Serpentard ne répondit rien, il repoussa doucement son compagnon et cette fois, il s'en alla sans se retourner … et sans bien savoir où ses pieds l'emmenaient.

 

 

 

 
 
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