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au 31 Mai 21 :
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Bec d'écaille, croc de plume
Par Jaiga
Originales  -  Romance/Fantaisie  -  fr
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    Chapitre 13     Les chapitres     64 Reviews     Illustration    
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Douceur matinale

Disclaimer : Tous les personnages/ lieu/ périodes sont issus de mes dérivations intellectuelles. J’ai cependant utilisé certains personnages pour des forums Rpg, ne vous étonnez donc pas si vous les croisez un jour, au hasard du net.

Notes :

- Comme d’habitude, je m’excuse par avance pour les fautes de grammaire ou d’orthographe qui m’ont échappée, j’avoue avoir des lacunes dans ce domaine, en particulier sur un ordinateur …

 __________________________________________________________________________________

Chapitre 13 : Douceur matinale

Libellule avala lentement une gorgée de café. Le liquide était brûlant, amer, et la réchauffa agréablement lorsqu’il coula dans sa gorge. Boisson délicieuse et salvatrice, qui chaque matin, lui apportait le salut… Et dire qu’à l’origine, elle n’existait pas, dans leur monde. Non, elle avait dû attendre d’emménager à la Volière pour goûter à sa toute première tasse de café. Elle s’en souvenait d’ailleurs comme si cela c’était produit la veille… Un véritable coup de foudre s’était produis ce jour là. Dès que ses lèvres eurent trempé dans le liquide, un raz de marée de sensation s’était emparé d’elle, la laissant dévastée, sonnée, et ce à tout jamais.

Libellule adorait, vénérait, adulait, glorifiait le café. Plus que n’importe qu’elle autre chose, elle en avait besoin pour vivre, sous peine d’agoniser d’en d’atroces souffrances, d’être sujette à un effet de manque dévastateur, ou, tout simplement, de rester à l’état de carotte paraplégique toute la journée durant.

La plupart des machines avaient besoin de carburant, elle, elle avait besoin de café. Un peu comme une potion magique, ou une drogue dure, qui lui permettait de rester fraîche et alerte jusqu’au matin suivant.

Beaucoup de personnes dans l’immeuble qualifiaient son énergie de don céleste, ou de trait particulier des nymphes. Et nombreux étaient ceux qui tentaient de percer son secret, en vain. Puisque le secret n’existait pas, étant donné qu’elle prenait son café matinal tous les matins à la même heure, à l’aube, dans la salle à manger de la Volière. A croire que personne n’avait jamais songé aux propriétés de la caféine sur l’organisme d’une nymphe hyperactive. Grâce à cela, elle parvenait à gérer les coups de pouces à sa jumelle Elécy, son travail en tant que conseillère du prince Lékilam, et aussi la supervision de l’approvisionnement en nourriture de tous les résidents, ainsi que de la préparation des trois repas quotidiens. Cette dernière tâche, même si elle ne l’effectuait pas seule, aidée par une bonne dizaine de volontaire pour passer derrière les fourneaux, était tout de même assez épuisante pour les muscles, comme pour les nerfs. Du moins, sur un être vivant normal. Libellule, elle, paraissait ne pas connaître le sens des mots « stress », « fatigue », et « découragement ». Toujours disponible, toujours souriante, rendant service à la moindre occasion de le faire, passant derrière les grosses bêtises pour essayer de sauver les meubles, d’un coup de baguette magique. Une petite fée à la chevelure verte.

Une petite fée qui, entre l’heure de son coucher officiel et celle de son café matinal, tirait une tête à faire peur, et assassinait sur place le moindre enquiquineur potentiel. La preuve en était toutes ces fois où elle avait été réveillée en urgence par un appel nocturne, d’un Pavel face à un problème de maladie princière qu’il ne pouvait décidemment pas gérer seul. C’était les rares moments où l’on pouvait enfin entr’apercevoir une Libellule épuisée, et à bout de nerf. Autant dire qu’ils n’étaient donc pas nombreux à connaître cette facette de sa personnalité.

Elle reposa sa tasse sur le plan de travail, en poussant un soupir de bien être. La drogue se répandait lentement, dans ses veines, et son système digestif. Elle remonta les manches de sa robe de chambre en laine, et s’attaqua à l’épineux problème du petit déjeuner matinal.

Ils n’étaient vraiment pas nombreux, à assister à ce repas là. A moins d’être en pénurie de matière première, rares étaient les phénix qui se hasardaient dans la salle à manger le matin. Seul les célibataires endurcis, et encore, se risquaient à l’expérience.

La nymphe, en tant que responsable de la cuisine et première levée, et ce quelque soit les circonstances, se chargeait donc de disposer les maigres victuailles matinales sur la grande table de la pièce. Dans la cuisine, les viennoiseries, confitures et autre tranches de brioches étaient préparées la veille, les mottes de beurre et les morceaux de viandes ou de fromages attendaient sagement dans le frigidaire, les céréales et les boissons patientaient dans leurs bouteilles et leurs packs en plastique, jusqu’à ce que Libellule vienne les sortir, tous les matins, pour les disposer soigneusement.

Après, chacun était libre de venir, ou pas, ce n’était plus son problème. Elle s’installait sur une chaise, avec une seconde tasse de café, et ne se préoccupait plus de la moindre petite chose jusqu’à la fin de son repas. Le plus souvent, elle ne faisait même pas attention aux personnes qui venaient déjeuner en même temps qu’elle, si ce n’était que pour un maigre salut de la main.

Que l’on soit simple phénix, ou garde du corps de l’héritier du trône.

Comme de nombreux matins, Pavel était la seconde personne à mettre les pieds dans la salle à manger. Rarement plus vêtu que d’un pantalon de pyjama, éventuellement un jean enfilé à la va vite, il était là ponctuellement, plusieurs fois par semaine. Les jours où son prince réclamait en toute légitimité qu’on lui porte son petit déjeuner au lit, plutôt que dans son bureau au dernier étage. Ce qui arrivait assez fréquemment, aux yeux du blond, qui était chargé de la manœuvre.

Il entra dans la pièce d’un pas las, et balayait l’endroit d’un morne regard doré. Il n’eut pas même un haussement de sourcil en apercevant Libellule, qui lui fit pourtant un lumineux sourire.

-Bonjour !

Elle n’obtint pour toute réponse qu’un grommellement inintelligible, dont elle ne tint pas rigueur. Après tout, tout le monde ici savait bien que le garde du corps n’avait jamais été très bavard, encore moins le matin. Et elle était sans doute l’une des mieux placée pour le constater. Pourtant, elle ne désespérait pas de le rendre un peu plus… sociable, un jour. Ou lui faire au moins perdre l’habitude de fusiller du regard toutes les personnes qu’il croisait pour la première fois. On ne s’en rendait pas tout de suite compte, comme ça, mais Pavel était quelqu’un d’assez impressionnant. Surtout lorsqu’il se promenait avec une épée à la hanche.

Libellule le vit attraper un plateau, dans l’un des vieux buffets décrépis de la pièce. Ils sentaient bon le vieux bois et la cire d’abeille, et leurs portes aux vitres teintes en jaunes étaient perpétuellement grande ouverte, sur leur contenu de piles d’assiette et de couverts.

Pavel était donc assez impressionnant, du moins pour certaines personnes. D’autres savaient très bien que dans une certaine mesure, il était tout à fait inoffensif. Il valait mieux ne pas le contrarier, ni s’approcher un peu trop près de son protégé, mais globalement, Pavel n’était pas vraiment menaçant. A moins que son prince ne lui donne l’ordre de l’être.

-On ne vous a pas beaucoup vu, hier soir, hasarda-t-elle sur le ton d’une conversation bénigne.

Les épaules du blond se raidirent un peu, et un verre émit un claquement sec lorsqu’il le posa un peu trop brusquement sur le plateau. La nymphe choisit la retraite stratégique dans sa tasse de café, non sans le quitter du regard, de l’air d’une personne qui attendait innocemment la réponse d’une question pas si innocente que ça.

-Et alors ? Je ne vois pas ce que le prince aurait eu à faire dans une fête. Surtout si elle était donnée en l’honneur de deux types dont on ignore encore tout, et qui pourraient très bien être…

-Pavel.

Le ton qu’avait employé le garde du corps était glacial, quasiment polaire. Et ses doigts crispés sur le pauvre fruit qu’il tenait dans sa main, qui menaçait d’ailleurs d’éclater, soumis à une trop forte pression, affirmaient une certaine irritation.

Cependant, Libellule l’avait interrompu d’une inflexion de voix équivalente à la sienne, voire même supérieure.

Rare étaient ceux qui étaient capable de tenir tête au garde du corps. Libellule faisait néanmoins partie de cette rare catégorie de personne, qui se comptait sur les doigts de la main. Après tout, elle n’avait pas été nommée ici en tant que conseillère juste pour ses talents culinaires. Et elle était une nymphe, de surcroît. Soit par définition, une jeune femme plantureuse, consciente de ses charmes, et de ce fait, au caractère bien trempé. Et si ses formes généreuses étaient bien peu souvent mises en valeur par la jeune femme, sa détermination et sa confiance en elle étaient très loin de rester en arrière.

Pavel poussa un soupir las, et desserra l’étau de ses doigts autour du pauvre fruit, qui s’écrasa sur le plateau en un bruit fort peu ragoûtant.

-Prends du café. Tu en as besoin, conseilla la jeune femme d’une voix nettement plus chaleureuse, en poussant vers lui une tasse pleine à raz bord du liquide noir.

Pavel considéra un moment l’objet fumant, indécis. Puis finit pas tirer une chaise, et s’asseoir pour avaler de longues gorgées de boisson. La nymphe sourit, et entreprit à sa place de garnir le plateau d’aliment divers et variés.

-Tous les autres phénix ne sont pas aussi… prudents que toi. Ni aussi perspicaces.

Pavel émit un grognement, et reposa sa tasse de café.

-Ils se comportent comme si de rien n’était, alors qu’il y a un dragon dans nos murs. Tu réalises, Libellule ? Un dragon ! Ils ont massacré des centaines d’entre nous, nous font la guerre depuis des siècles, nous harcèlent constamment…

-Tu exagères… Le dernier conflit remonte à plus de trois milles ans, et il n’impliquait que les trois clans les plus virulents à votre égard. Tous les autres sont en paix depuis longtemps.

Pavel renifla dédaigneusement. Le pire, pour lui, était que la nymphe avait parfaitement raison. En réalité, mis à part le clan Garnësir, et une poignée d’autres, les dragons n’avaient plus été en conflit avec eux depuis plusieurs millénaires. Ils n’étaient pas vraiment en paix, ni en désaccord avec eux. Les deux peuples évitaient simplement les contacts trop rapprochés, ou autres que commerciaux. Ainsi, tout allait pour le mieux.

- Tu dois comprendre les autres, Pavel. Tu sais aussi bien que moi qu’ils ne sont pas ici par hasard. Et qu’ils rêvent tous que la première occasion se présente pour partir d’ici. Alors quand quelqu’un débarque en disant être un commerçant qui cherche à nouer de nouveaux contacts, qu’il soit un phénix, un dragon ou la réincarnation du dieu des cacahuètes, ça leur est complètement égal.

Pavel acquiesça d’un grognement. Il n’avait pas été présent bien longtemps, lors de la fête de la veille. Il avait juste accompagné quelques minutes le prince à peine guéri, afin que l’on puisse attester de l’intérêt du futur souverain pour les occupants de la Volière. Mais ils ne s’étaient pas attardés, et avaient regagné les appartements princiers pour profiter du calme inopiné que leur offrait cette soirée. Toutefois, les yeux perçant du blond avaient parfaitement saisi les regards avides ou les manières mielleuses qu’employaient certains phénix lorsqu’ils parlaient à l’un des deux nouveaux arrivants. Comme un oiseau bariolé qui exécuterait une danse amoureuse, pour attirer les femelles. Ou un prédateur affamé se trouvant face à un énorme morceau de viande juteuse. Mais il savait pertinemment que les réactions de ces personnes étaient excusables.

Chaque personne qui se trouvait ici, homme, femme, enfant ou étranger, n’y était pas sans raison. Si au début, la tour avait été construite pour pallier à la destruction de plusieurs autres, dans leur monde d’origine, et accueillait de ce fait bon nombre de réfugié qui fuyaient la guerre, la population s’était aujourd’hui clairsemée, et renouvelée. Et soigneusement sélectionnée.

La reine n’allait pas confier son unique fils à une bande de rustres ou de dangereux criminels…

Aussi, les interrogatoires qu’avaient subis chacun des résidents n’étaient pas innocents. Aujourd’hui, on ne trouvait plus dans l’immeuble que des jeunes couples, des familles en quête d’un nouveau foyer, de simples petits commerçants qui étaient venus ici dans l’espoir de gagner un peu plus. Et des personnes volontairement écartées par leurs familles ou des personnes plus influentes. Lyde, par exemple, le barman et le propriétaire du Yellow bird… Pavel savait que l’un de ses frères l’avait évincé rapidement du royaume, pour une sombre question d’héritage, en lui confiant soit disant sa modeste auberge à la cour princière. Cour qui était bien loin d’en être une, et auberge qui se limitait à l’époque à une sorte de buvette pour les gardes et les Chevaliers ardents de la Volière.

Et comme lui, il y avait encore beaucoup d’autres habitants de la Volière, à ne pas être venu ici de leurs pleins grès. Sans parler que, par un hasard absolument fabuleux, la majorité d’entre eux n’avait pas d’antécédents militaires ou de proches disparus pendant une guerre avec des dragons, et d’ailleurs, rares étaient ceux qui étaient un tant soit peu au coeur des conflits de l’époque. Alors effectivement, la venue d’un étranger était comme providentielle.

Et comme le prince avait longuement tenté de lui faire avaler, même la présence de ces dits étrangers n’était pas anodine. Scysios était officiellement là en tant qu’envoyé de la reine Gaïa, souveraine des démons, pour veiller sur la santé fragile du prince. Libellule faisait depuis longtemps partie des ambassadeurs étrangers les plus efficaces, et proches de la reine. Le poste que cette dernière lui avait offert, conseillère du prince, était autant une promotion, qu’un moyen supplémentaire pour veiller à distance à ce que son rejeton ait une éducation convenable, et soit tolérant envers les autres peuples. Et les deux derniers étrangers, récemment arrivés, étaient là dans l’optique d’augmenter les liens commerciaux des phénix, tout en entamant des procédures pour ramener une paix durable et apaiser enfin les velléités qui opposaient phénix et dragon depuis des siècles, conformément au souhait de la reine Emélcya.

Pavel avait eu un peu de mal à digérer la pilule. Mais ce n’était pas à lui de décider.

-Je suis vraiment la dernière personne de cette maudite tour à garder les yeux en faces des trous, marmonna-t-il en avalant une nouvelle gorgée de café.

-Oh, non, j’en connais qui pensent comme toi.

Comme le blond levait un sourcil interrogatif, par-dessus sa tasse, la nymphe haussa les épaules, et continua.

-Elécy. Elle a pesté pendant des heures, quand elle a apprit que Kellnet avait parlé avec les nouveaux.

-Elle n’a pas tort. Ta Jumelle a toujours eu les pieds sur terre, contrairement à d’autres, maugréa-t-il en appuyant particulièrement sur son dernier mot.

Libellule se permit un sourire, et prit la parole innocemment, en inspectant ses ongles.

-Je te rappelle qu’Elécy à peur des maudits.

Un regard assassin se posa sur elle, qu’elle contra d’un sourire sarcastique. Touché.

Elle savait parfaitement que le sujet des maudits était sensible, avec Pavel. Sans doute autrefois partageait-il l’avis de la grande majorité de la population, et éprouvait-il une aversion profonde pour la couleur violette, surtout lorsqu’elle entrait dans les caractéristiques physiques d’une personne, qu’elle soit pour les yeux, les cheveux, ou même la peau, chez certains peuples. Mais elle était persuadée que dès sa rencontre avec le prince, tout avait changé.

La chevelure de ce dernier n’était pas exactement celle du violet des maudits, celle du regard de Scysios, par exemple. Elle était plus claire, plus vive. Mais s’en rapprochait néanmoins. Aussi, nombreux étaient ceux qui le surnommaient « le prince maudit », et qui cherchaient à l’évincer de la famille royale, en argumentant par exemple les circonstances extraordinaires de sa venue au monde. Et beaucoup d’autres phénomènes plus ou moins incroyables qui avaient poussé la reine à envoyer son fils loin de leur monde, sur une terre où il serait à l’abri des médisances, mais aussi des assassins.

Libellule sourit encore, et avala une nouvelle gorgée de café.

--

Une sonnerie stridente retentit dans la chambre, émanant d’un téléphone portable glissé dans la poche d’un blouson négligemment abandonné sur le sol.

Pendant quelques secondes, Ehissian se mit à maudire cet engin diabolique, et à se jurer de ne plus jamais le laisser allumé pendant la nuit. Puis, il se souvint de la raison particulière qui l’avait poussé à le laisser justement allumé pendant la nuit, et poussa un grognement.

L’étreinte des bras de Fallnir se resserra un peu plus, autour de sa taille, en même temps que le dragon émettait un grognement inintelligible, et remuait légèrement dans son sommeil troublé. Le phénix eut un sourire mi amusé, mi attendri, et après une intense micro seconde de réflexion, retourna se lover tout contre lui, dans la chaleur de son giron.

Après tout, la sonnerie était réglée pour s’éteindre au bout de quelques secondes. Alors il n’y avait qu’à attendre un peu, et ils pourraient se rendormir en toute quiétude, pendant encore plusieurs heures.

Il bondit vivement hors du lit, cherchant frénétiquement à réunir ses vêtements éparpillés sur le sol de la chambre.

Fallnir poussa un grognement, et tendit vaguement la main pour le retenir, afin de ramener sa bouillotte vivante qui l’embêtait vraiment, à remuer autant de si bon matin.

-Grmblmkispasse ? Marmonna-t-il en se frottant les yeux, enfouit sous les draps.

Ehissian s’arrêta quelques secondes de sautiller pour enfiler son jean.

-Je dois aller bosser, répondit-il en s’escrimant à fermer un bouton récalcitrant. Et je suis déjà à la bourre.

Il ne savait pas par quel miracle il avait pensé, la veille, ou plutôt quelques heures auparavant, à programmer le réveil de son téléphone. Mais c’était sans aucun doute une bénédiction divine. A cause de son court voyage pour chercher les médicaments du prince, auquel s’ajoutait sa précédente absence ainsi que la tempête de neige, on ne pouvait pas dire qu’il fréquentait souvent l’épicerie, ces temps ci. S’il ratait encore une matinée de travail, il n’y avait pas le moindre doute que Kellnet sauterait sur la première occasion pour l’étriper.

Le soupir que poussa Fallnir fut si sonore qu’il dut même faire frissonner la lune. Allongé sur le dos, le bras au dessus de sa tête, il le regardait du coin de l’œil, une moue boudeuse sur le visage.

-Je vais me retrouver tout seul toute la journée.

Ehissian eut un sourire, et vint s’agenouiller sur le lit pour lui voler un baiser.

-Si tu viens à la salle à manger à midi, on pourra peut-être se voir…

Le dragon fit une grimace peu convaincue, mais opina silencieusement. La perspective de passer une matinée calme et solitaire lui paraissait bien étrange, surtout après la nuit qu’ils venaient de passer, à faire la fête jusqu’à une heure très tardive. Et à dévorer le corps d’un phénix dans un état d’ivresse avancée, un peu après la fin des festivités.

Quoiqu’il ne fût pas contre quelques heures de sommeils en plus.

-C’est promis ? Hasarda-t-il en se tournant vers lui, s’enfouissant un peu plus sous les draps. Tu disparaîtras pas avant ?

Jamais il ne pourrait dormir tranquille s’il n’était pas sûr de le revoir ensuite… Il ne supporterait pas une nouvelle frayeur, comme la veille et l’avant-veille. Ehissian avait beau lui avoir raconté les raisons de sa disparition, entre deux baisers, il ne pouvait s’empêcher d’être encore un peu inquiet.

-Promis.

Un nouveau baiser lui fut volé. Puis, Ehissian se redressa, pour disparaître derrière la porte de la chambre. Il savait que le phénix devait encore filer prendre une doucher chez lui, puis se changer, avant d’aller prendre un petit déjeuner. Fallnir ferma les yeux.

Lui, il avait encore quelques petites choses à grignoter, en guise de repas. Et dans le meilleur des cas, il ne se réveillerait que quelques heures avant le déjeuner, ce qui lui éviterait de devoir toucher à ses réserves.

--

Lorsque Ehissian débarqua dans la salle à manger, vêtu d’un jean ayant connu de meilleurs jours et d’un t-shirt délavé, il trouva assis à la table un Pavel torse nu, et une Libellule en robe de chambre, tous deux devant leurs tasses respectives.

Le petit déjeuner était probablement le seul moment de la journée pendant lequel on pouvait se promener sans se soucier de sa tenue vestimentaire. Parce que les rares personnes à y assister étaient majoritairement celles qui travaillaient au Yellow bird, celles qui se couchaient donc à des heures tardives. Et n’étaient donc pas réputés pour leur fraîcheur et leur vivacité d’esprit dès le matin, au réveil. Alors tout le monde passait l’éponge, et fermait les yeux. De toute manière, tous étaient trop pudiques pour ne pas se rendre un minimum présentable. Il arrivait parfois à certains de se présenter vêtu en tout et pour tout d’un simple caleçon, ou d’une légère robe de nuit, mais ce n’étaient qu’en de très rares circonstances, et surtout lorsque la nuit précédente avait été particulièrement courte.

Après avoir vaguement salué les deux jeunes gens, Ehissian s’attabla à leurs côtés, sans plus attendre. Son estomac grognait, et par-dessus tout, sa tête lui faisait mal de chien. Et comme d’habitude, Libellule avait pensé à tout, en disposant quelques tubes de cachets sur la table. La nymphe avait toujours été prévoyante, en particulier les lendemains de fête. Le médicament se désagrégea dans son verre d’eau en émettant un petit sifflement.

-Tu as bu combien de verre ? S’enquit Pavel d’un ton lourd de reproche, les sourcils froncés.

Ehissian se gratta pensivement le front, penaud. Il savait bien qu’il ne supportait pas plus que ça l’alcool. Mais la musique et l’ambiance de la fête lui avaient complètement fait occulter ce détail. Et ses souvenirs n’étaient pas très nets, passé une certaine heure… Mis à part de vagues réminiscences de ses activités avec un certain dragon aux yeux clairs, et la vague lumière de son portable, peut-être, lorsqu’il avait pensé à l’allumer dans un éclair de lucidité.

- A vrai dire… Je ne sais plus vraiment… Murmura-t-il en baissant les yeux.

-Il est tombé ivre mort sur le comptoir, claironna joyeusement Libellule en reposant sa tasse. Même que Lyde a dû demander à quelqu’un de le ramener dans sa chambre.

Le jeune homme ouvrit la bouche pour protester, mais la referma bien vite, sentant ses joues le brûler. La nymphe avait entièrement raison. Il était tombé complètement saoul sur la desserte du bar, et Lyde, dans sa grande mansuétude, et surtout dans son désir de faire de la place pour servir les autres phénix, avait interpellé la première bonne âme venue pour qu’il l’accompagne jusqu’à sa chambre. Le sort était tombé sur Fallnir, qui s’était subitement retrouvé dans le champ de vision du barman, à la suite d’une bousculade volontaire de Shézac, à qui la scène n’avait pas échappé. Et le visage sombre du barman s’était fendu d’un large sourire en apercevant ce si serviable – et nouveau, donc ignorant- dragon désoeuvré.

Ehissian tenta de se fondre dans sa chaise, jusqu’à ne faire plus qu’un avec elle, et disparaître du champ de vision de Pavel avant que celui-ci ne le transforme en bouillie. Ou autre chose d’encore plus mou et plus liquide, à en voir la flamme meurtrière qui brillait dans les yeux du blond. Avec un peu de chance, sa mort serait juste longue et douloureuse, au lieu d’être atroce et interminable.

Pourtant, le garde du corps finit par hausser les épaules, et reporter toute son attention vers son café. Il n’y avait pas que Libellule, qui était accro… Même si Pavel refusait d’avouer qu’il avait des points faibles, le café était pourtant en tête de liste, juste en dessous du prince Lékilam. Et c’était probablement les deux seules choses au monde capable de lui faire perdre son calme, ou le contrôle de la situation.

--

Un rayon de soleil tentait en vain, depuis plusieurs heures, de s’infiltrer à travers les stores de la chambre. Il insistait depuis que l’aube l’avait mis au monde, sans grands résultats cependant. La barrière de plastique ne lui laissait aucun chemin, aucun passage, même infime, à travers lequel il aurait pu se glisser. Et il se retrouvait donc bloqué, coincé devant ce barrage artificiel, qui l’empêchait de continuer sa route droite de rayon solaire.

Le volet avait beau se réchauffer, au fil du temps qui passait, et au contact du malheureux faisceau lumineux, il restait cependant tristement terne et fixe, dénué d’intérêt. Alors que derrière lui, dernière la fenêtre…

Tout un monde de couleurs, de textures et de mouvements l’attendait. Des dizaines de matières à faire lentement réchauffer, des centaines de couleurs à faire vivement chatoyer, comme un arc en ciel, éphémère et délicat.

Il attendait patiemment, le petit rayon de soleil. Depuis que l’aube l’avait vu poindre sur cette partie de terre, il attendait que le soleil atteigne l’endroit de sa course céleste où il pourrait enfin se glisser dans l’étroit passage, comme le faisaient déjà beaucoup d’autres autours de lui. Ce moment arriverait bientôt, il le savait, il le souhaitait de toute sa force, refusant de penser que peut-être, il glisserait lentement du store jusqu’à la façade de pierre et de blocs sculptés.

Cela se produisit sans même qu’il ne s’en rende compte. Un mouvement, un déplacement d’air, ou tout simplement un bras éreinté qui s’était faiblement levé pour tirer sur la ficelle magique, celle qui, d’une seule pression, faisait varier la luminosité à l’intérieur de la pièce, et ce par un simple déplacement de plaquettes de plastique. Merveilleuse invention que les stores, songea Shézac en laissant retomber sa main fatiguée sur le lit.

Le petit rayon s’en donna à cœur joie, et se faufila sans plus attendre à l’intérieur. C’est avec un plaisir non dissimulé qu’il rencontra le contact merveilleux d’une peau, agréablement douce et tiède, qui n’attendait que lui pour prendre un peu plus de chaleur. S’il en avait été capable, il aurait probablement ronronné de plaisir. Mais il n’était qu’un petit rayon de soleil. Alors il se contenta de s’installer, et d’éclairer gaiement le corps de l’un des deux démons.

-Hmmm… pourquoi t’as allumé la lumière…. Marmonna Scysios en remuant légèrement, les yeux encore clos.

Shézac eut un sourire, et l’embrassa sur le front. La lumière matinale n’était pas encore très forte, et il n’avait qu’entrouvert les stores. Et mis à part le petit point lumineux sur la joue du médecin, l’éclairage était encore doux et tamisé, celui d’un tranquille matin d’hiver.

-Je voulais voir l’heure qu’il était… répondit-il à mi voix, en se rallongeant confortablement contre l’autre démon.

Il n’eut en guise de réponse qu’un bâillement fatigué, et un corps chaud qui se blottit un peu plus contre le sien, cherchant un contact un peu plus poussé, comme par exemple un bras autour de sa taille. Celui là même qui s’était levé un instant plus tôt pour ouvrir les stores.

Shézac sourit de nouveau, attendri. C’était toujours la même chose, avec lui. Scysios était capable de faire n’importe quoi, du moment qu’il grappillait quelques minutes de sommeil en plus. Et pour cela, il disposait d’innombrables techniques, qu’il avait peaufinées au fil du temps, pour les rendre de plus en plus opérantes.

Celle-ci par exemple était un grand classique, qui n’avait jamais perdu de son pouvoir. Comment résister à l’envie de rester encore un peu sous les draps, à serrer contre soi le corps recroquevillé d’un châtain endormi ? C’était tout bonnement impossible, même avec des raisons urgentes. Du moins, pour Shézac. Tirer Scysios du sommeil avait toujours été un grand défi, même lorsque ce dernier était encore haut comme trois pommes. D’ailleurs, tout n’avait fait qu’empirer lorsqu’il avait grandi…

Le blond effleura du bout des lèvres l’oreille de son compagnon, laissant échapper un murmure.

-C’est l’heure d’aller à l’école…

Il glissa une main le long de ses reins, caressant sa peau nue et tiède, comme il le faisait depuis des siècles. A la manière d’un peintre qui faisait glisser son pinceau le long d’une toile, son doigt suivit lentement la ligne de sa colonne vertébrale, aérien et tentateur.

Si Scysios était devenu très fort pour grappiller des minutes, Shézac avait aussi appris mille et une manières de le contrer, quelles que soient ses techniques. Néanmoins, il n’y parvenait pas à chaque fois. Le savoir de l’un surpassait les moyens de l’autre.

-‘Fait longtemps que j’y vais pu, répondit la voix ensommeillée du médecin, qui n’avait pas même pris la peine de remuer un cil, nullement affecté par les caresses pourtant irrésistibles du blond.

-Hmm… C’est vrai. Mais c’était bien, quand tu y allais. T’étais trop petit pour protester quand je t’y traînais de force.

Shézac, couché sur le flanc, se redressa un peu en prononçant ces mots, et s’accouda au matelas pour mieux observer le démon endormi à ses côtés. Ce dernier souriait, les yeux fermés, blottit contre lui, un drap léger remonté jusqu’à ses épaules dévêtues.

-Je sens encore la douleur de tes coups de pieds aux fesses… souffla-t-il rêveusement, une moue désobligée affichée sous ses paupières closes.

Shézac éclata de rire, un rire léger et clair, qui rappelait sans que l’on parvienne à en saisir la raison, le bruit d’un ruisseau forestier, ou d’une cascade légère. Il prit le visage du médecin entre ses mains, pour rapprocher leurs visages, et prendre doucement possession de ses lèvres.

Il l’embrassa longtemps, sans s’interrompre, lui laissant à peine le temps de reprendre son souffle. Comme un assoiffé qui viderait sa coupe d’un seul trait, ou quelqu’un qui venait de manquer de s’étouffer, et aspirerait l’air à grande goulée. Il se nourrissait de ses lèvres, s’en rassasiait, rattrapait tout le temps perdu et les années passées sans pouvoir seulement les effleurer. La faim qui l’habitait semblait intarissable…

Ses mains glissèrent lentement le long du dos du démon, embrasant la peau qui passait sous ses paumes, la caressant et la faisant frémir. L’une s’arrêta sur ses reins, point sensible et délicat, qui pouvait faire trembler une personne lorsqu’on l’abordait avec sagesse ; l’autre descendit plus bas, jusqu’à une hanche frémissante, dont ses doigts se saisirent avec appétit. Il sentit ceux du médecin se crisper, sur sa colonne vertébrale, et appuyer sur sa chair, comme pour garder une attache solide et concrète dans le monde réel, et ne pas se faire emporter pas une vague de désir trop brusque.

Quand le blond détacha leurs lèvres, difficilement, il est vrai, il repartit aussitôt à l’attaque de la peau douce qui s’offrait à lui, aux muscles reposés qui se tendaient et se détendaient au rythme de ses caresses. Le cou de Scysios était délicieux, doux et tendre, accueillait les baisers et les morsures comme aucun autre ne le faisait, se creusait et se penchait parfois pour laisser plus de mouvement, plus de champ d’action à cet irrésistible agresseur qui le maltraitait si délicieusement.

Un soupir, une respiration erratique atteignit les oreilles de Shézac, puis un gémissement, alors que ses lèvres marquaient une épaule arrondie d’un suçon dominateur.

- ‘Zac…

Le susnommé leva à peine les yeux, concentré qu’il était par sa tâche. Il ne daigna même pas détacher ses lèvres de la chair de son cou.

-Hmm… ?

Trouvant on ne sait comment la force nécessaire, Scysios gesticula tant bien que mal, parvint même à décrocher ses mains du dos du blond, pour venir repousser ce dernier. Malgré ses joues rougies, ses yeux clos pour ne pas trahir son envie, et sa peau de plus en plus chaude sous les baisers de son congénère.

- On va pas… encore…

Il s’interrompit, et se mordit les lèvres, pour tenter de réprimer un nouveau gémissement, qui lui vint malgré tout. C’est qu’il avait toujours été sensible, dans cette zone là, juste en dessous … Et là aussi, plus haut, dans le creux…

Shézac le connaissait trop bien. Résister à ses avances était impossible, lorsqu’il était bel et bien décidé à aller jusqu’au bout. Du moins, le médecin n’en était-il pas capable.

-Et pourquoi pas ? Glissa le blond dans un souffle, au creux de son oreille, chatouillant avec malice son épiderme de sa respiration enivrée.

Une paupière s’ouvrit difficilement, et un œil améthyste le regarda d’un air qui se voulait courroucé. Et honteux, aussi, ou tout du moins gêné.

-Je vais plus pouvoir marcher…

Shézac haussa les épaules, et sourit furtivement.

-Si c’est juste ça qui te tracasse… Il n’y a qu’à échanger…

Et il repartit à l’assaut de sa peau, pour rassasier son envie de le goûter, de le toucher et de l’entendre, toujours plus, toujours plus longtemps.

Il avait tellement de chose à se faire pardonner… Et il y avait tellement peu de manière de le faire. Celle-ci était l’une de celles qu’il connaissait certainement le mieux, même s’il savait qu’elle n’était pas forcément la meilleure. Il devait rattraper son comportement des jours précédents, son arrivée surprise, le fait de ne pas avoir pris le temps de s’éclaircir au plus vite avec lui, d’être parti comme un voleur, le lendemain matin de leurs retrouvailles au Yellow bird, sous prétexte que le prince avait ordonné un rendez vous à la mi-journée. Et tant d’autres choses, encore plus lointaines que celles ci…

En réalité, il serait éternellement endetté, jusqu’à la fin de ses jours. Jamais il ne pourrait rembourser ce qu’il devait à Scysios. Même si ce dernier ne cessait de lui rabâcher qu’il ne lui était aucunement redevable.

--

Shézac bâilla, et en remontant négligemment son caleçon d’une main, poussa de l’autre la porte de la salle à manger.

C’était véritablement la première fois qu’il mettait les pieds dans cet endroit. Depuis que lui et Fallnir étaient arrivés à la Volière, il s’était toujours contenté de ce qu’il avait déniché dans ses placards, ou de rapides repas pris en ville. Il fallait dire que sentir au moins une trentaine de regard curieux braqués sur lui, à chaque bouchée qu’il avalait, n’était pas une perspective particulièrement… encourageante. Et il avait trouvé un petit restaurant, à quelques rues de là, qui servait des pizzas particulièrement savoureuses. D’autant plus que le serveur était tout à fait charmant, et…

Bref.

Scysios l’avait expressément envoyé chercher quelque chose à grignoter. Par quelque chose, il entendait sûrement bon nombre de pâtisseries et autres boissons chocolatées, sucrées, et très mauvaises pour la santé, à moins d’être un démon capable d’ingérer quoi que ce soit sans se soucier de l’impact sur son métabolisme.

Une bonne odeur de café lui chatouilla les narines, et lui fit prendre une grande inspiration. Il n’avait jamais été un grand amateur de café. Mais il avait appris à apprécier son odeur, tous les matins, si chaude et réconfortante.

-Hm… Je devrais venir ici plus souvent…

Il soupira de bonheur, et entra dans la large pièce. Son regard se posa aussitôt sur la frêle silhouette, enveloppée dans un large peignoir, qui leva les yeux de son nectar divin pour lui sourire.

-Oh… Salut Libé, j’aurais dû me douter que se serait toi…

La nymphe n’en sourit que plus, et lui rendit son salut, en l’invitant à prendre place.

Ehissian et Pavel étaient tous deux partis depuis quelques temps. L’un pour aller travailler, l’autre pour porter de quoi déjeuner à un prince certainement affamé. La nymphe aurait normalement dû les imiter, ne serait ce que pour se rendre dans la salle de classe, et accueillir d’éventuels enfants matinaux. Mais la cafetière avait sifflé à ce moment là, comme pour saper sa motivation, et l’inciter à traînasser encore un peu. Ce qu’elle avait fait.

Oui, elle était faible, dénuée de volonté, complètement asservie par les rituels quotidiens. Mais tant pis, c’était trop bon.

- Bien dormi ? S’enquit-elle avec un sourire, tout en poussant lait chaud et chocolat en poudre vers le blond.

A chacun ses addictions. Elle savait que celle de Shézac était fortement concentrée en cacao.

-Merveilleusement bien… T’aurais un plateau, quelque part ?

-Dois-je en conclure que tu ne resteras pas pour déjeuner à mes côtés ?

Elle désigna du doigt l’armoire grande ouverte, et s’accouda à la table. Le démon lui fit une révérence, doublé d’un sourire charmeur, et commença à faire main basse sur deux exemplaires du contenu de chaque panier à nourriture de la table.

-Navré, mais il y a un petit démon qui occupera mon lit tant que je ne lui aurais pas apporté de quoi remplir son estomac.

- Il occupe ton lit, ou c’est toi qui occupes le sien ? Souligna Libellule en le regardant remplir deux grandes tasses de chocolat chaud.

Le blond marqua une pose, sembla réfléchir, puis haussa les épaules en lançant un sourire étincelant.

-Ca change quelque chose ?

La nymphe ne put retenir son fou rire plus longtemps. Shézac avait toujours eu le don de la faire rire aux éclats pour la moindre broutille. Avec sa bouille d’ange et ses mimiques expressives, le blond était pour elle une sorte de clown ambulant capable de lui donner le sourire même dans les jours de pénuries de café. Qu’est ce qu’elle avait été contente, lorsqu’elle avait compris qu’il resterait à la Volière…Cela signifiait enfin le retour d’un petit peu d’action, dans sa vie morne et répétitive, un peu de changement dans la routine de la vie parmi les phénix. Un Shézac arrivait toujours avec son lot d’aventures et d’embrouilles. Beaucoup plus d’embrouilles que d’aventures, d’ailleurs.

-Pavel ne va pas apprécier… Réussit-elle à pouffer, une main sur la bouche et les yeux fermés.

Le blond se stoppa et haussa un sourcil, dans une posture qui redoubla les rires de Libellule.

- Le garde du corps du prince… Le blond qui fait tout le temps la tronche, précisa-t-elle devant l’air un peu plus interrogatif de Shézac.

-Le blond qui fait tout le temps la tronche … Oh, le grand bien foutu ?

Libellule ne répondit pas, et s’effondra à la place sur la table, les larmes aux yeux. Et le démon comprit qu’il avait bien saisi de qui elle parlait. Même s’il dut attendre plusieurs minutes avant de replacer un mot, de peur de la voir s’étrangler de rire. Les nymphes étaient de constitution fragile, mine de rien.

- Et en quoi ça embête monsieur, que je fasse des galipettes avec mon meilleur ami ?

- Justement, il ne sait pas que c’est ton meilleur ami, expliqua la jeune femme en se retenant difficilement d’éclater de nouveau.

Shézac parut songeur, un instant. Si Libellule n’avait pas été autant préoccupée par son envie de rire, elle aurait certainement noté cette expression, qui signifiait trop souvent qu’un mauvais coup était en train de germer, dans l’esprit du blond. Surtout quand il se mettait juste après à sourire aussi largement.

-Vraiment ? Il ne sait pas ? Alors il va falloir faire en sorte qu’il s’en rende compte très vite.

Quelque chose venait enfin de s’enclencher, dans sa tête. L’une des pièces manquantes du puzzle venait de se rajouter aux autres. Et une certaine menace qu’un certain médecin était venu lui rapporter, à une certaine heure avancée d’une certaine nuit, avait enfin trouvé son explication.

Pavel allait voir ce qu’il allait voir, aussi bien foutu soit-il.

--

La plaque d’égout résista un peu, lorsqu’Ader tenta de la pousser. Il fallait dire qu’il n’utilisait pas souvent ce passage là. Seulement une fois par an.

Elle donnait sur une petite rue étroite, au fins fond du vieux quartier de la ville, que même les rats et les chats errants ne fréquentaient plus. Dans ce coin là, les égouts servaient tellement peu qu’ils étaient restés tel quels, et qu’aucun vampire n’était jamais venu s’y installer. La nourriture y était trop rare, et les possibilités de constructions trop réduites, comparées à d’autres sections souterraines entièrement rénovées, transformées en dortoir ou chambres de luxes pour créatures de la nuit. Il suffisait juste de savoir détourner et éviter les rivières d’eaux usées.

La lumière était sombre et bleutée. L’aube n’était pas encore levée, même si cela n’était plus qu’une question de minute. A l’horizon, à travers les nuages et les toits des maisons, on pouvait même apercevoir un morceau de ciel qui se teintait lentement en or, sous les rayons du soleil matinal. Les lampadaires étaient encore allumés, là bas, dans une rue non loin, mais leur lumière était trop pâle et faible pour parvenir jusque dans ce boyau éloigné.

Ader extirpa sans peine son corps souple des égouts malodorants, pas fâché de respirer de l’air pur. La douche qu’il prendrait à son retour promettait d’être longue et très savonneuse, surtout qu’il lui faudrait repasser par ce même chemin, une fois sa tâche accomplie.

Il épousseta soigneusement sa veste en cuir, pour en chasser toute trace de saleté. Il n’y avait rien de pire qu’une trace jaunâtre sur sa veste. Qu’il y ait de la poussière sur son jean, cela passait encore, celui-ci était tellement délavé que personne ne pourrait faire la différence. Mais sur son cuir, hors de question. Il le tenait de son prédécesseur, l’ancien chef des vampires du secteur de la Volière. Celui qu’il avait dû éventrer, pour pouvoir poignarder plus facilement son cœur. Et ce jour là, comme aucun témoin de la scène n’avait semblé vouloir faire d’objection, il avait pris la place de l’ancien chef, et son blouson. Mais c’était une autre histoire.

La plaque racla bruyamment contre le sol, quand il la remit en place. Ceci fait, il fourra ses mains dans les poches de son pantalon, et s’empressa de quitter la ruelle, d’un pas vif.

Le paysage n’était pas particulièrement frappant. C’était un quartier tombé en disgrâce, trop âgé pour être moderne, trop récent pour être considéré comme historique. Bon nombre des familles qui l’habitaient autrefois étaient parties ailleurs, et les quelques personnes âgées qui habitaient encore les maisons les mieux conservées n’étaient pour la plupart même plus capable de sortir de chez elles. Parfois, on apercevait, entre les grilles rouillées d’un portail, un petit jardin entretenu avec amour, ou une forêt vierge digne d’un roman d’aventure. Les fenêtres des maisons étaient dotées de stores antiques, de petits rideaux brodés, de planche et de briques, de vitres aux carreaux cassés. On ne trouvait pas le moindre commerce, dans ce quartier. Les seuls passant étaient des oiseaux qu’Ader jugeait débiles, ou des voitures qui semblaient indifférentes à la décrépitude de la zone environnante, encore que ces dernières fussent plutôt rares. D’ailleurs, lorsque le vampire bifurqua dans une petite rue étroite, il n’en croisa plus aucune. L’heure matinale n’aidait sans doute pas.

Les faibles lampadaires s’éteignirent, un par un, comme si une main invisible les eut recouvert d’un manteau opaque.

Ader marqua une courte pose, et tira une cigarette d’une poche de son blouson. Il reprit sa marche en tirant une longue bouffée du bâtonnet de nicotine, portant un regard éteint sur les volutes de fumées qui se détachaient dans la lumière de l’aube.

Depuis combien de temps n’était-il pas venu ?

La réponse lui apparut aussi rapidement que la réponse, lui arrachant un sourire désabusé.

Un an. Un an, jour pour jour. Et depuis combien de temps venait-il ? Ca, il avait arrêté de compter…

Ses pieds marchaient tout seul, ses jambes le guidaient sans qu’il s’en rende compte. Son corps connaissait le chemin par cœur, depuis le temps. C’en était presque risible, presque. Ader, l’un des caïds de la ville nocturne, qui restait debout après l’aube et fuyait son repère en cachette, en veillant à ne pas se faire surprendre par ses subordonnés… Et tout ça pour aller où ?

Pour aller sur un vulgaire tas de cendre, songea-t-il amèrement.

Pas exactement de cendre, d’ailleurs. Il restait encore quelques pans de mur, et quelques poutres noircies, voire carbonisée. Un monceau de gravas, un assemblage de bout de brique, de pierre et de béton, des morceaux brûlés et rabougris d’objets du quotidien. Des plaques et des outils en métal. Les derniers restes du garage de cet enfoiré, cette saloperie qui chaque année, le même jour, venait l’emmerder jusque dans ses rêves, pour le pousser à revenir ici.

Il ne réalisa qu’il avait prononcé à voix haute cette dernière phrase, que lorsque le propre écho de ses paroles lui revint, renvoyé par les façades miraculeusement intactes des autres maisons.

Ader faisait face aux ruines, campé sur ses deux jambes, les mains dans les poches et la cigarette au bec. On aurait presque pu le prendre pour un vulgaire promeneur, qui restait un instant songeur face à ce qui restait d’une vieille maison brûlée.

Oh oui, il aurait tellement aimé n’être qu’un simple spectateur. Un simple passant, qui se demandait ce qui avait bien pu se passer ici. Une petite vieille qui avait laissé le gaz de sa cuisinière allumé trop longtemps ? Un feu de cheminée, ou une bougie renversée, qui avait embrasé aussitôt les vieux planchers de la bâtisse ? Une sombre histoire de dette ou de faillite ? Et qui habitait là, à l’époque ? Un petit couple de vieux, oublié par ses enfants ? Une famille sans le sou ? Un junkie qui se contentait de squatter les lieux ?

Rien de tout cela. Lui, il était acteur. Directement sur le plateau. Il lui suffisait de fermer les yeux, pour se rappeler du texte et de la mise en scène.

Un mignon petit couple de jeunes, et leur rejeton de dix ans à peine. Et le père de la nana, un immigré du monde des phénix, qui avait profité de l’installation de ceux-ci pour changer d’air, avec sa petite famille. Le vieux était à moitié démon, pas vraiment immortel, mais d’une longévité plutôt exceptionnelle. Il avait d’ailleurs l’air aussi âgé que sa charmante et jolie jeune fille, et passait, auprès du rare voisinage, pour le grand frère un peu marginal qui collait aux basques de sa petite sœur.

Le vieux avait une passion pour la mécanique, et occupait allègrement le garage de la vieille maison, retapant tout ce qui lui passait sous la main. Son gendre travaillait dans une petite boutique en ville, sa fille donnait des cours de dessins aux enfants en difficultés. Le morveux allait à l’école, comme tous les gamins de son âge.

Ils étaient presque intégrés, presque. Comme s’ils avaient toujours vécu là.

Mais les vampires savaient bien que non. Ils savaient bien que ce n’était qu’une famille d’étrangers, d’usurpateurs, qui venaient les chasser de leurs terres, les dépouiller de leurs droits ancestraux.

L’époque du grand massacre était arrivée, sans prévenir. Le gendre et la fille avaient été saignés comme des porcs, à quelques rues de là, alors qu’ils revenaient des courses. La maison avait flambé, avec le vieux et le gosse dedans, sous les rires et les acclamations des vampires, qui comparaient alors le bûcher à un grand feu de joie.

C’était ce qui s’était réellement passé. Dans les grandes lignes. Mais tout le monde avait oublié cette histoire, qui n’était, dans le fond, qu’un massacre parmi beaucoup d’autre. Les rares voisins avaient toujours cru à un règlement de compte, entre une bande de jeune et le grand frère mécano, qui avait viré au macabre. Ils étaient à présent mort de vieillesses, ou partis emménager dans un quartier plus vivant, et devaient certainement avoir classé cette histoire dans la rubrique « fait divers » de leurs mémoires.

Au final, plus personne ne venait ici. Plus personne, à part lui, grand couillon qui jouait les durs, mais ne manquait jamais le rendez vous avec ce foutu tas de cendre.

- Ader ?

Ah non, c’était vrai. Il y avait bien quelqu’un d’autre qui se souvenait encore.

Le vampire réalisa qu’il s’était accroupi devant la ruine, pour toucher distraitement la poussière. Il ne se redressa pas, ne tourna même pas la tête. Il savait déjà qui venait.

Maerys, assurément. Les mains dans les poches de son jean, un vieux t-shirt noir avec un dessin idiot, et son vieux chapeau en feutre enfoncé sur les oreilles, comme chaque année. C’était le seul objet qui avait échappé au feu de joie. Le chapeau du vieux. Ader se demandait parfois s’il avait bien fait de le filer au gosse. Mais il se rappelait généralement ensuite qu’un chapeau, ça n’allait pas avec une veste en cuir.

Il écrasa sa cigarette sur le bitume de la rue, volontairement à l’écart de la poussière de la bicoque en ruine. Celle-ci avait suffisamment connu de cendre comme ça. Chez eux, une rumeur disait que les phénix, par respect pour les victimes des massacres vampires, avaient jeté sur les ruines de chaque maison détruite un sort qui conserverait à jamais les lieux en l’état anéantis, comme s’ils étaient prisonniers d’un bloc de glace. Il ignorait si c’était vrai, et si oui, comment cela fonctionnait ; tout ce qu’il savait, c’était que depuis des décennies, rien ni personne n’avait touché aux ruines de la maison, ni de mains humaines, ni le vent, ni la pluie.

-T’es matinal, pour une fois, lança-t-il sur le ton de la conversation au jeune vampire. T’avais plus de came, ou quoi ?

Il entendit les pas du gosse s’arrêter à côté de lui, légèrement en retrait. Pas besoin de lever les yeux, pour imaginer les siens perdus dans le brouillard du souvenir.

-Le lit était trop froid. J’avais pas envie d’aller me pieuter maintenant.

Ader eut un sourire narquois. Si les vampires fuyaient le jour, c’était simplement parce que leurs yeux étaient moins efficaces, sous les rayons du soleil. Alors ils dormaient une bonne partie de la journée, et vaquaient à leurs occupations habituelles une fois l’obscurité arrivée.

-Je te signale que de nous deux, c’est toi, le chauffe-lit.

La petite pique n’eut aucun effet sur le plus jeune. Il se contenta juste de sourire, peut-être un peut trop rêveusement pour être vraiment connecté avec la réalité.

-Ca fait vingt-cinq ans, aujourd’hui, murmura-t-il d’une voix brumeuse qui confirma les pensées d’Ader.

Ce dernier se remit à contempler les ruines. Là bas, sous une poutre en morceau, un bout de clef à molette noirci dépassait un peu des monceaux de gravats. Un rayon de soleil vint jouer sur le métal dépoli, comme pour leur apprendre que l’aube était à présent bien entamée.

- Vingt-cinq ans… Ca te fait quoi, alors ? Trente-cinq ?

-Trente-six, corrigea Maerys. J’avais onze ans.

Onze ans, lorsque ses parents étaient morts, et qu’il avait entendu les clameurs des vampires se rapprocher de la maison. Onze ans, lorsque son grand père l’avait saisi par le col, et balancé dans le placard le plus proche. Onze ans, lorsque qu’il avait vu, par le trou de serrure de ce même placard, son grand père s’affaisser lentement, dans l’étreinte d’un vampire. Onze ans, quand ce même vampire lui avait donné ce semblant de baiser, fatal pour tant d’autre, tout comme il aurait dû l’être pour lui.

Vingt-cinq ans que le vampire l’avait laissé pour mort dans la rue, faible et vidé de son sang. Vingt cinq ans que sa vue s’était troublée devant le spectacle des flammes qui léchaient la vieille bâtisse, que son regard s’était soudain éteint, et qu’il avait perdu connaissance, ne sentant même plus les coups de pieds des vampires qui étaient venus, deux minutes à peine après la morsure funeste, constater s’il était bien mort.

Vingt-cinq ans qu’il était un vampire.

Ce jour là, Ader croyait lui avoir évité, à lui comme au vieux, une mort lente et douloureuse. Il n’avait qu’à moitié réussi. L’ainé des deux vampires n’oublierait jamais cet autre jour où, trois semaine à peine après le massacre, il avait aperçu une petite silhouette sale vider sans vergogne de son sang un junkie sous overdose. Tout comme Maerys n’oublierait jamais non plus la tronche éberluée qu’avait fait Ader en le reconnaissant, et en réalisant qu’il avait foiré.

-Trente-six… T’es encore qu’un gamin, mine de rien.

En réalité, pour devenir vampire, il fallait un échange de sang. Le vampire tout comme la victime devaient respectivement boire le liquide de vie de l’autre, pour qu’il y ait transformation. Ce jour là, Ader avait dû zigouiller quatre de ses congénères, pour parvenir plus tôt à la maison du vieux. Le quartier était bouclé, pour que personne ne puisse rentrer ou sortir. Pas d’allié impromptu, ni de possibilité de fuite, un traquenard parfait duquel il était impossible de s’enfuir. Il était déjà couvert de sang, le sien et celui de ses semblables, lorsqu’il avait tué le vieux. Ca avait giclé sur Maerys, lorsqu’il l’avait mordu à son tour. C’était probablement à cet instant qu’il y avait eu échange.

Après ceci, le temps que la transformation se fasse, que le changement soit total, un jeune vampire continuait généralement de vieillir pendant encore quatre ou cinq années. Ce qui expliquait que le jeune brun semblait à peine faire quinze ou seize ans.

Ader parcourut sa silhouette du regard. Mince et effilé, la peau blanche et les yeux changeants, comme tous les vampires. Néanmoins, il ressemblait un peu au vieux. Le même visage, le même regard moqueur, insolent. Les mêmes cheveux, noirs comme de l’encre. Les mêmes mains, douces et fines, qui lui paraissaient tellement habiles lorsqu’elles manipulaient outils et vis, chalumeaux et bouts de métaux.

Il les sentait encore, pleines de cambouis, qui le plaquaient avec force contre un mur. Ou beaucoup plus sereines et calmes, quand le vieux lisait et qu’une de ses mains tournait lentement les pages, tandis que l’autre glissait doucement dans les cheveux d’Ader, qui posait alors la tête sur ses genoux. Il sentait aussi ses lèvres enfiévrées, qui parcouraient son corps comme un affamé, ses bras plus musclés qu’ils n’en avaient l’air, qui le serraient contre lui à l’en étouffer. Les tapes qu’il lui donnait parfois à l’arrière du crâne, juste pour le plaisir de le faire enrager. La force avec laquelle ses doigts s’accrochaient à son blouson, pendant qu’il buvait son sang. La force avec laquelle ils s’étaient accrochés à lui, ce jour là en particulier. Et ce dernier sourire qu’il lui avait fait. Ce foutu sourire qu’il revoyait toujours dans ses rêves, tous les ans, à la même date.

Saloperie de vieux.

-Ader ?

Maerys était enfin sorti de ses songes. Il le fixait, calmement, les bras croisés sur son torse.

-Hm ?

Le plus vieux se redressa, et enfouit de nouveau ses mains dans les poches de son jean. Le jour était déjà là. Ils devaient rentrer, c’était l’heure.

-Je crois… Je crois que je reviendrai pas, l’an prochain, annonça le jeune brun en se mordant la lèvre inférieure.

Ader sourit. Un sourire cynique, moqueur, ou peut-être pas, justement. Il tourna les talons, sans un regard pour le tas de cendre, et leva au contraire son visage vers le ciel, l’offrant quelques instant aux rayons matinaux, savourant les yeux fermés la chaleur sur sa peau glacée. Il fit un pas, le dos tourné à Maerys, juste le temps de s’allumer une nouvelle cigarette.

-Dans ce cas… Peut-être que ce n’est plus la peine que je vienne non plus.

Il tira une longue bouffée de sa cigarette, et observa les volutes fumées. Avant de se remettre à marcher, prenant le chemin du retour, le regard obstinément rivé droit devant lui.

-Tu viens ? Lança-t-il sans se retourner à l’adresse de son cadet.

Maerys jeta un dernier regard aux ruines de la maison, comme pour imprimer l’image en lui, définitivement.

Et détala à la suite d’Ader, avant que ce dernier ne le sème.

A suivre…

ooo

Autant je n’aime pas beaucoup la plupart des chapitres précédents, autant celui-ci, je l’aime bien. Je ne saurais pas trop dire pourquoi, d’ailleurs…Peut-être parce que Scysios et Shézac y sont définitivement réconciliés, et que l’on en apprend un peu plus sur Ader et Maerys ? J’espère d’ailleurs que ces deux personnages vous paraitront maintenant plus sympathiques que lors de leur première apparition, dans le chapitre 10… :p

Les prochains chapitres seront riches en révélations, ou en explications de vieilles questions qui étaient restées jusqu’à lors sans réponse. Moi, j’ai tout dans la tête lorsque j’écris, et je relis régulièrement ; mais compte tenu des nombreux écarts entre chaque publication de chapitre, je suppose qu’il doit en être autrement pour vous, et que je risque de vous embrouiller encore plus que vous ne devez déjà l’être, avec le désordre total qu’est cette fiction. TT

Sur ce, je vous remercie énormément d’avoir lu jusqu’ici. J’aimerai beaucoup connaître votre ressenti par rapport à ce chapitre, ce que vous avez aimé, ce qui ne vous a pas plu… Alors n’hésitez pas à me laisser une review, ou même un mail pour me faire part de vos moindres remarques, négatives comme positives. :3

A très bientôt !

 
 
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